samedi 31 décembre 2016

SES, Thème 2 : Classes, stratification et mobilité sociale, Comment analyser la structure sociale, terminale ES

Thème 2 : Classes, stratification et mobilité sociale
Chapitre 1 : Comment analyser la structure sociale ?
I-                   Des inégalités multiples

A-    Des inégalités économiques
1-      Des inégalités économiques diverses
Une inégalité est la différence d’accès à une ressource valorisée dans une société (argent, prestige, culture…), conduisant à une hiérarchie entre les individus, groupes sociaux (telle position vaut mieux qu’une autre).
Ces inégalités tendent à structurer la société. On parlera de stratification sociale pour montrer que la société est constituée de différentes strates, couches sociales.
Ø  Inégalités de salaire
Pour mesurer les inégalités économiques, on utilise souvent les déciles. Cela signifie qu’on a coupé la population en 10 tranches égales de 10%. On peut aussi couper en 100 tranches de 1% (centiles), en 4 tranches de 25% (quartiles) ou encore en 5 tranches de 20% (quintiles).
On peut remarquer que les 10% des salariés les plus riches gagnent au moins 3 fois plus que les 10% des salariés les plus pauvres en France. On appelle ce rapport, le rapport interdécile (D9/D1).
Ø  Inégalités de revenu
Le revenu disponible comprend :
-          Les revenus mixtes : revenu des indépendants (artisans, commerçants, agriculteurs)
-          Les revenus du travail : salaire, honoraires, traitement
-          Les revenus du capital : intérêts, dividendes, loyers
On retire à ce total les prélèvements obligatoires : impôts (ISF), taxe d’habitation, taxe foncière, cotisations sociales. Enfin on ajoute les revenus de transfert : allocations (chômage, maladie, vieillesse, familiales, RSA). 
            Les inégalités de revenu sont les plus fortes chez les indépendants. En 2007, les 10% des artisans les plus riches gagnaient au moins 5.5 fois plus que les 10% des artisans les plus pauvres. De même, le taux de pauvreté est le plus élevé chez les indépendants, ¼ des agriculteurs étaient pauvres en France en 2007, c’est-à-dire inférieur à 60% du revenu médian. C’est le seuil de pauvreté (1000€ par mois). Environ 14% des Français sont pauvres aujourd’hui.
è Malgré le fait que les prélèvements obligatoires soient majoritairement payés par les riches et que les revenus de transfert soient majoritairement perçus par les pauvres, les inégalités de revenu sont supérieures aux inégalités de salaire à cause des revenus du capital. Les inégalités ont donc tendance à se cumuler : les salariés les plus riches peuvent épargner et donc générer des revenus du capital supplémentaires.

Ø  Inégalités de patrimoine
Le patrimoine représente l’ensemble des biens et titres qu’un individu possède. Ces propriétés vont générer de l’argent où permettre à l’individu d’en économiser. C’est ce qui prend de la valeur au cours du temps (maison, œuvres d’art).
Les patrimoines sont les plus élevés chez les indépendants. Cela provient généralement des héritages reçus des générations précédentes. Le patrimoine s’accroit de génération en génération.
Le patrimoine des professions libérales s’est constitué grâce à leurs revenus importants qui leur assure une forte capacité d’épargne et qui leur permet de se constituer un patrimoine.
Les inégalités économiques sont cumulatives : les inégalités de revenu génèrent des inégalités d’épargne qui entrainent des inégalités de patrimoine et à nouveau à des inégalités de revenu (cercle vicieux). 
Le rapport interdécile du patrimoine est d’environ 70 aujourd’hui. Les 10% des Français les plus riches ont un patrimoine au moins 70 fois supérieur aux 10% des plus pauvres.
2-      Les pays les plus riches sont moins inégalitaires que les pays pauvres
Les pays les plus égalitaires sont les pays scandinaves ainsi que certains pays d’Europe de l’est. La France et l’Allemagne sont dans la moyenne. Les pays les plus inégalitaires sont la Turquie, le Mexique, le Chili, c’est-à-dire des pays moins développés que les pays les plus égalitaires.
Les pays les plus inégalitaires sont les pays en développement (en Asie ou en Afrique).
Pour constater ces inégalités on utilise le coefficient de Gini et les courbes de Lorenz.

B-    Des inégalités sociales

Ø  Les inégalités femme/homme
On distingue plusieurs types d’inégalités homme/femme :
-          Dans la sphère privée (au sein du foyer) : la répartition des tâches domestiques est inégale. Les femmes y passent 1.5 fois plus de temps que les hommes, principalement à effectuer des tâches ménagères (ménage, cuisine, linge) et s’occuper des enfants. Les hommes passent plus de temps que les femmes au bricolage, jardinage.
-          Dans la sphère publique. - Les inégalités professionnelles. Les femmes sont moins payées (environ 15% de moins) que les hommes. Les femmes sont plus souvent à temps partiel. Elles occupent plutôt les postes en bas de la hiérarchie, les hommes occupent les postes en haut : on appelle cela de la ségrégation verticale à l’emploi ou plafond de de verre. Elles font moins souvent parti des instances dirigeantes des entreprises. – Il existe aussi les inégalités dans la vie politique. Les femmes occupent moins souvent des mandats électoraux (maire, député, président) mais des postes politiques moins valorisés dans les domaines de la culture, de la santé ou dans l’environnement.
è Les inégalités dans la sphère publique s’expliquent en partie par les inégalités dans la sphère privée. Si la répartition des tâches était plus égalitaire, les femmes pourraient plus s’investir dans la sphère publique.

Ø  Les inégalités face à la santé/à la mort
En France, de 2000 à 2008, un homme cadre de 35 ans pouvait espérer vivre encore 47.5 ans. Chez les ouvriers, cette espérance de vie n’était que de 40.9 ans. Les hommes cadres vivent donc 15% plus longtemps que les hommes ouvriers à 35 ans.
Ces inégalités peuvent face à la mort peuvent s’expliquer :
-          Les ouvriers renoncent plus souvent aux soins que les cadres (faute d’argent).
-          Le travail des ouvriers est plus usant que le travail des cadres.
-          Les ouvriers ont des comportements plus à risque que les cadres (tabac, alcool).
-          La culture des ouvriers ne les poussent pas à se plaindre et à aller régulièrement chez le médecin.
Il existe aussi une inégalité d’espérance de vie entre les hommes et les femmes puisqu’elles vivent en moyennes 6 ans de plus que les hommes.
Ø  Les inégalités ethniques
En 2009 en France, 16% de la population active immigrée était au chômage contre seulement 8.5% pour la population non immigrée. En 2002, 27.2% des enfants d’immigrés étaient au lycée général contre 39.7% des enfants de parents non immigrés.   
Ces inégalités s’expliquent par :
-          Les discriminations ethniques.
-          Le niveau de diplômes atteints est plus faible, la maîtrise de la langue est moins bonne.
-          Les inégalités de revenu entre immigrés et non immigrés conduisent à des inégalités de logement (surpeuplement).
Les inégalités scolaires (moins de réussite) contraignent à occuper des postes moins valorisés (ouvrier).
Ø  Les inégalités scolaires  
En France, 14% des diplômés à bac +5 ont des parents ouvriers ou inactifs alors que 42% des bac +5 sont des enfants de cadres supérieurs/professions libérales.
è Plus les études sont longues et difficiles, plus les milieux favorisés sont représentés et inversement pour les milieux défavorisés. L’orientation scolaire est donc inégalitaire en France.

Ø  Les inégalités culturelles
En 2008, 10% des cadres français regardaient plus de 20heures/semaine la télévision alors que cela concernait 49% des ouvriers.
Ces différences d’utilisation de la télévision peuvent être perçues comme des inégalités lorsqu’on sait que ce loisir est dévalorisé dans notre société et qu’il est principalement utilisé comme un moyen de divertissement et non pour accéder à une culture savante.
è Plus généralement, les pratiques culturelles valorisées sont essentiellement le fait des catégories supérieures (lecture, théâtre, exposition). Les pratiques culturelles dévalorisées représentatives des catégories populaires (télévision). 
Une différence se transformera en inégalité dès lors qu’elle donnera à certains des avantages par rapport à d’autres. Les inégalités sont donc potentiellement innombrables.
C-    Les inégalités se cumulent souvent
Bourdieu analyse la structure sociale à partir de 3 formes de capitaux :
-          Le capital économique : il représente l’ensemble des richesses financières d’un individu.
-          Le capital  social : ensemble des relations sociales qu’un individu peut utiliser en sa faveur (piston).
-          Le capital culturel : ensemble des connaissances, savoirs que possède un individu grâce à ses études et à ses pratiques culturelles.
Le capital social des milieux favorisés peut être utilisé par les parents pour permettre à leurs enfants de progresse dans la hiérarchie. En effet, leurs relations les amènent à connaître des individus capables de leur proposer l’entrée à des écoles prestigieuses/des emplois valorisés. Les cadres pourraient donc plus facilement pistonner leurs enfants que les ouvriers (qui n’ont pas ces relations).
è Une inégalité de capital social conduit à une inégalité d’insertion professionnelle.
Les inégalités conduisent très souvent à un cercle vertueux (pour les milieux favorisés) ou à un cercle vicieux (pour les milieux défavorisés).  En effet, un revenu élevé permettra d’obtenir un logement spacieux dans un beau quartier. Les enfants pourront donc travailler au calme et étudier dans des écoles bien classées. Les enfants auront accès à la culture valorisée. La réussite scolaire probable de l’enfant se traduira par un accès à un emploi valorisé qui lui assurera un bon revenu.
On parle de reproduction sociale, d’hérédité sociale ou encore d’immobilité sociale.
Cela signifie que la structure socio-professionnelle a tendance à se reproduire de génération en génération. Les enfants de milieux favorisés continueront généralement à appartenir à ces milieux à l’âge adulte.
è Au final, les inégalités ont tendance à se cumuler. Une inégalité en entraîne une autre. On dit qu’elles font système. Elles ont tendance à se renforcer de génération en génération ce qui creuse les écarts entre les extrêmes (inégalités de patrimoine). La reproduction sociale est importante dans notre société.

II-                Les différentes théories de la stratification sociale

A-    Les analyses traditionnelles
1-      Pour Karl Marx, la société est structurée en 2 classes sociales
Pour Marx, les classes sociales ont toujours existé, elles ne sont pas propres au système capitaliste. Par exemple, elles existaient au Moyen Age entre les nobles et le tiers-état. Pour Marx, dans toutes les sociétés, des groupes s’affrontent pour l’accès aux ressources valorisées. Il y a des groupes dominants et des groupes dominés qui s’échelonnent dans la hiérarchie sociale.
La structure sociale actuelle est fondée à partir de 2 classes sociales essentielles : le prolétariat et la bourgeoisie. La bourgeoisie est la classe sociale qui possède les moyens de production, le capital. Elle n’a pas besoin de travailler pour vivre. A l’inverse, les prolétaires ne possèdent que leur force de travail pour subvenir à leurs besoins.
Pour Marx, le système capitaliste tend à toucher à sa fin. A force d’être exploités, les prolétaires vont renverser la bourgeoisie et mettre en place une dictature : une collectivisation des moyens de production, une réduction importante des inégalités qui fera disparaître le système des classes sociales, c’est l’ère du communisme.
Pour définir une classe, on se base sur 2 critères :
-          Une classe sociale est d’abord une classe en soi. Les groupes occupent des positions opposées dans le système de production (propriétaire/non propriétaire). Les rapports de classes seront donc conflictuels. Les bourgeois cherchent à maximiser leurs profits, les prolétaires cherchent à survivre (hausse des salaires). De fortes inégalités économiques existent donc dans la société.
-          Une classe sociale est aussi une classe pour soi. Les individus ont conscience d’appartenir à un groupe particulier, ils connaissent et ressentent leur position dans la hiérarchie sociale.
Au final, les classes sociales existent réellement pour Marx. Elles ne sont pas une simple construction des sociologues et des économistes.


2-      Pour Max Weber, la stratification a 3 dimensions
Le concept de classes sociales chez Weber a des points communs avec celui de Marx : les individus d’une même classe partagent une place commune dans le système de production. Comme chez Marx, les classes sont fondées sur un critère économique. Cependant, Weber y ajoute un critère social : les classes n’ont pas la même culture, le même mode de vie.
Les classes n’existent pas réellement, elles ne sont qu’une construction des sociologues : les individus ne se sentent pas d’appartenir à telle ou telle classe.
Les groupes de statut regroupent des individus avec des valeurs, cultures communes leur permettant d’atteindre un certain prestige social. Les individus ressentent à quel groupe de statut ils appartiennent aux yeux de la société (leur place est-elle enviable ou non).
Weber propose une approche pluridimensionnelle où chacune est indépendante des autres. Il rend ainsi mieux compte de la complexité des sociétés. Ainsi, être en haut dans une dimension n’implique pas d’être en haut dans les autres et inversement (éboueur -> en bas dans les groupes de statut mais au milieu dans les classes sociales/les dirigeants de maisons closes -> en haut des classes sociales mais en bas dans les groupes de statut).
La troisième dimension de la stratification sociale est celle de partis politiques : groupes d’individus cherchant à prendre/influencer le pouvoir en sa faveur.  
B-    Les prolongements contemporains
1-      Distinction et imitation selon Bourdieu
Bourdieu distingue essentiellement 3 classes sociales : populaire, moyenne, supérieure. Chaque classe partage des capitaux culturels, sociaux et économiques plus ou moins identiques. Les classes supérieures sont favorisées au niveau de ces capitaux, les classes populaires beaucoup moins.
Les classes supérieures, pour assurer leur prestige social, cherchent en permanence à se distinguer des autres classes. Ils dicteront à la société les pratiques valorisées (opéra, musée, polo).
Les classes moyennes cherchent  sans cesse à rattraper les classes supérieures en imitant leurs pratiques (théâtre de boulevard, tennis, golf) et veulent se distinguer des classes populaires pour ne pas être comparées à une classe qu’elles jugent inférieure.
 Les classes populaires ont tendance à s’auto exclure de ce jeu de distinction/imitation.  Elles ne cherchent pas à maitriser ces codes culturels et se contentent d’une culture de masse dévalorisée (télévision, variété, spectacles sportifs).
Des inégalités d’alimentation émergent entre les classes : foie gras/schmirwurst, plats raffinés quantités réduites/plats en abondance. De même au niveau du logement : grande villa/appartement HLM. Ainsi que des inégalités dans le tourisme : hôtel ****/camping, Gstaad/La Plagne.
L’approche de Bourdieu semble plus proche de celle de Weber car elle est pluridimensionnelle et aussi car ces classes n’existent pas réellement, elles sont une facilité de classement. On parle d’approche nominaliste. Les classes ne s’opposent pas que sur le type de biens et services consommés mais aussi sur la manière de le faire (souvent en retenue pour les milieux supérieurs, de manière plus grossière pour les milieux populaires).
2-      PCS : une construction statistique (professions et catégories socio-professionnelles)
Les PCS sont une nomenclature, un classement sur des critères objectifs, c’est un outil statistique construit par les sociologues dans lequel les individus ne se sentent pas appartenir à un groupe particulier.
Ø  1er critère : le statut professionnel :
-          Les indépendants : 1. Agriculteur exploitant
         2. Artisan, commerçant, chef d’entreprise
         31. Professions libérales
       -     Les salariés :             3. Cadre   4. PI    5. Employé    6. Ouvrier
Ø  2ème critère : le secteur d’activité :      
-          Pour les indépendants : secteur primaire 1, secteur secondaire 2, secteur tertiaire 2/31
-          Pour les salariés : secteur secondaire 6, secteur tertiaire 3/4/5

Ø    3ème critère : le niveau d’études/de qualifications :
-          Niveau élevé (>bac+3) : 3 (ingénieur, chirurgien)
-          Niveau moyen (<bac+2) : 4 (infirmier, techniciens)
-          Niveau faible (< bac) : 5 (vendeur, secrétaire) 
Les PCS n’ont pas pour objectif de discuter des classes sociales (pas de sentiment d’appartenance comme chez Marx, pas plusieurs dimensions comme chez Bourdieu).
Cependant on retrouve indirectement les classes sociales dans les PCS (classes supérieures = cadres/classe moyenne = PI et employés ouvriers qualifiés/classe populaire = ouvriers employés non qualifiés). 
On peut remarquer un déclin des catégories 1 et 2 depuis les années 1950 ainsi qu’un déclin chez les ouvriers (6) depuis les années 1970/1980. A l’inverse, une expansion des catégories 3,4 et 5 depuis les années 1970.

III-              La dynamique de la stratification sociale  
Aujourd’hui, les sociologues définissent les classes sociales à partir de 3 critères et il faut que les groupes cumulent ces 3 critères :
-          Les groupes sont inégalement situés dans le système productif (critère Marxiste). Les inégalités économiques seront importantes entre les groupes.
-          Les groupes sont marqués par une forte identité culturelle. Les inégalités sociales sont importantes.
-          Les groupes sont marqués par une forte identité collective. Les individus ont le sentiment d’appartenir à un groupe particulier.

A-    Moyennisation ou polarisation de la société ?
1-      Une tendance à la moyennisation au cours du XXème siècle

Ø  Le premier critère de la définition des classes sociales est-il d’actualité ?
Depuis les années 1960/70, les inégalités économiques ont tendance à décliner. En 1970, le rapport interdécile était de 4.6 alors qu’il était de seulement 3.5 en 2008. Les inégalités économiques se sont particulièrement réduites pendant les 30 glorieuses (1950-1980). Depuis les années 1970, les inégalités économiques ont stagné.
è Les inégalités économiques entre les groupes sociaux se sont réduites. Il ne semble pas possible de pouvoir parler de classes sociales sur la deuxième partie du XXe. La place des individus dans le système productif tend à se rapprocher :
-          Diminution du nombre d’ouvriers non qualifiés.
-          Mise en place du SMIG (1950) puis du SMIC (1970) salaire minimum interprofessionnel garanti/de croissance.
-          Généralisation de l’Etat providence à travers la sécurité sociale allocations maladie, familiale, retraite et allocations chômage.

Ø  Le deuxième critère de la définition des classes sociales est-il d’actualité ?
Tous les ménages ont aujourd’hui accès aux biens durables de base (frigo, télé, voiture, téléphone). Les conditions de vie des Français ont tendance à s’homogénéiser. Le taux d’équipement de ces biens est aujourd’hui saturé. On parle de démocratisation de l’accès au confort de base puisque de plus en plus de ménages ont des conditions de vie correctes.
On assiste également depuis les années 1950, à une démocratisation scolaire. De plus en plus d’enfants font des études longues. L’école permet de transmettre une histoire, une langue, une culture, des références et des valeurs communes.
De même, les styles vestimentaires s’homogénéisent. Pour Mendras, le jean et le barbecue sont les symboles de la moyennisation de la société, c’est-à-dire de l’émergence d’une vaste classe moyenne où se retrouvent de nombreux cadres, professions intermédiaires et de certains ouvriers et employés. Mendras parle de constellation centrale. Pour lui, la société a pris la forme d’une toupie.                                                                                                                                                                 https://images.schoolmouv.fr/ses-terminale-cours-13-img04.jpg
Cette constellation centrale est composée d’individus partageant plus ou moins une culture semblable et des conditions de vie homogènes.
è Les inégalités culturelles et sociales se sont peu à peu estompées depuis la fin de la 2 Guerre Mondiale. Les écarts entre les extrêmes se réduisent dans tous les domaines.

Ø Le 3ème critère de la définition des classes sociales est-il d’actualité ?
Les Français se sentent de moins en moins appartenir aux extrêmes de la société. 65% se classent dans une catégorie moyenne. Si on y ajoute la catégorie populaire, plus de 85% des Français se sentent plus ou moins moyens. Les classes extrêmes tendent à disparaitre : une seule et vaste classe moyenne perdure. Elle ne s’oppose à aucune autre. On ne peut pas véritablement parler de classes sociales (selon la théorie de Marx).
è Il ne semble pas possible, depuis la fin de la 2 Guerre Mondiale, de parler de classes sociales en France. Aucun des 3 critères de la définition n’est d’actualité. On parle de moyennisation de la société ou de fin des classes sociales.

2-    Assiste-t-on à un retour des classes sociales ? 
Ø  Le 1er critère de la définition des classes sociales est-il aujourd’hui de retour ?
Depuis le début du XXIème siècle, les inégalités économiques tendent à ré augmenter. En 2008, en France, le niveau de vie des 10% des plus riches est au moins 3.5 fois supérieur à celui des 10% des plus pauvres. Des inégalités économiques fortes semblent réapparaître. Par ailleurs, les inégalités de patrimoine sont toujours restées très importantes et ont eu tendance à s’accroître dans les années 2000 avec l’essor de la bourse (placements).
En 1955, en France, il fallait aux ouvriers 29 ans pour atteindre le niveau de vie des cadres compte tenu de l’augmentation des salaires (pendant ce temps, le niveau de vie des cadres va aussi augmenter). Seulement 29 ans d’écart de niveau de vie entre cadres et ouvriers laissaient un fort espoir aux ouvriers de voir leurs conditions de vie s’améliorer durant leur vie professionnelle. En 1955, le salaire moyen des cadres était 3.9 fois plus élevé que celui des ouvriers. De 1950 à 1955, le pouvoir d’achat moyen des ouvriers a augmenté en moyenne de 4.8% par an. La moyennisation semble incontestable, le rapport est passé de 3.9 à 2.7, les inégalités économiques baissent.
Cependant la dynamisation de ces inégalités est totalement défavorable aux ouvriers. Leur temps de rattrapage du niveau de vie des cadres a explosé à cause de la quasi-stagnation de leurs salaires, il leur faut aujourd’hui 170 ans pour rattraper le niveau de vie d’un cadre. C’est un gouffre dans lequel les ouvriers ne peuvent se projeter : ni eux, ni leurs enfants ne connaitront les conditions de vie d’un cadre d’aujourd’hui.
è Les inégalités économiques semblent de retour, le 1er critère de la définition des classes sociales semble à nouveau pertinent.

Ø  Le 2ème critère de la définition des classes sociales est-il de retour ?
Les inégalités sociales et culturelles n’ont pas disparues :
-          Les cadres partent 2 fois plus régulièrement, plus longtemps en vacances que les ouvriers et prennent aussi plus souvent l’avion.
-          Les inégalités de logement persistent. Les plus pauvres vivent plus souvent dans un logement surpeuplé que les plus riches. 
-          Les inégalités d’accès à la culture valorisée sont encore d’actualité, les catégories favorisées vont plus régulièrement au musée, à l’opéra et lisent plus souvent.
-          Les inégalités scolaires restent très marquées : l’école ne parvient pas à faire sortir les enfants de leur milieu (catégories populaires). L’échec scolaire sera important pour ces enfants, on parle plutôt de massification scolaire pour dire que tous les enfants vont à l’école mais il n’y a pas véritablement de démocratisation scolaire ce qui laisse penser que tous les enfants ont accès à tous les types d’études. Ce qui n’est pas du tout le cas dans les faits.

è Les inégalités culturelles et sociales perdurent. On peut y ajouter également la dynamique de distinction/imitation de Bourdieu : même lorsqu’une activité est pratiquée par toutes les catégories, elle ne l’est pas de la même manière (cinéma, télévision, vacances…). Le 2ème critère de la définition semble d’actualité aujourd’hui.

Ø  Le 3ème critère de la définition des classes sociales est-il aujourd’hui de retour ?
De plus en plus d’individus ne se sentent pas appartenir à une classe sociale. Et s’ils disent appartenir à une c’est très souvent la classe moyenne. Il semble impossible de conclure aujourd’hui à un retour du sentiment d’appartenance à des classes sociales. Cependant le sentiment d’appartenance tend à ré augmenter faiblement.
è Il semble que nous ne pouvons pas parler de retour des classes sociales à l’heure actuelle puisque le 3ème critère n’est pas respecté. Objectivement, les inégalités économiques et sociales sont importantes mais les Français n’en ont pour l’instant pas conscience : peu se sentent défavorisés, favorisés.

B-    Des frontières de plus en plus brouillées du fait de la multiplication des critères de différenciation sociale
Le déterminisme de classe est une expression montrant l’importance de la reproduction sociale : les enfants seraient contraints par leur origine sociale, les enfants de catégorie populaire feraient encore partis de la classe populaire, de même pour les enfants de classes favorisées. Ce déterminisme semble s’affaiblir avec la mise en évidence de nouvelles inégalités qui vont complexifier la lecture de la société en termes de classes sociales. Les frontières entre les classes seraient moins imperméables, elles auraient tendance à être brouillées.
En plus de la problématique de l’existence ou non des classes sociales, l’analyse de la structure sociale s’est complexifiée ces années, les sociologues ayant fait émerger des inégalités transversales. Celles-ci traversent les différentes catégories sociales et brouillent la lecture en termes de classes sociales. 
Les inégalités homme/femme traversent toute la société et ont tendance à former deux groupes : homme dominant/femme dominée. Cela se répercute avec les groupes de classes aisées/classes populaires.
Les inégalités territoriales traversent aussi les catégories sociales : certaines régions sont plus attractives/dynamiques que d’autres.

è Si les classes sociales existent, elles sont moins affirmées que par le passé du fait de l’existence de ces inégalités transversales multiples.