Thème
2 : Classes, stratification et mobilité sociale
Chapitre
1 : Comment analyser la structure sociale ?
I-
Des inégalités multiples
A-
Des inégalités économiques
1- Des
inégalités économiques diverses
Une inégalité est la différence
d’accès à une ressource valorisée dans une société (argent, prestige, culture…), conduisant à une hiérarchie
entre les individus, groupes sociaux (telle position vaut mieux qu’une
autre).
Ces
inégalités tendent à structurer la société. On parlera de stratification
sociale pour montrer que la société est constituée de différentes strates,
couches sociales.
Ø
Inégalités de salaire
Pour
mesurer les inégalités économiques, on utilise souvent les déciles. Cela
signifie qu’on a coupé la population en 10 tranches égales de 10%. On peut
aussi couper en 100 tranches de 1% (centiles), en 4 tranches de 25% (quartiles)
ou encore en 5 tranches de 20% (quintiles).
On peut remarquer
que les 10% des salariés les plus riches gagnent au moins 3 fois plus que les 10%
des salariés les plus pauvres en France. On appelle ce rapport, le rapport interdécile (D9/D1).
Ø
Inégalités de revenu
Le revenu disponible
comprend :
-
Les revenus mixtes : revenu des indépendants (artisans, commerçants, agriculteurs)
-
Les revenus du travail : salaire, honoraires, traitement
-
Les revenus du capital : intérêts, dividendes, loyers
On retire à ce total les prélèvements
obligatoires : impôts (ISF), taxe d’habitation, taxe foncière,
cotisations sociales. Enfin on ajoute les revenus de transfert : allocations (chômage, maladie, vieillesse, familiales,
RSA).
Les
inégalités
de revenu sont les plus fortes chez les indépendants. En 2007, les 10%
des artisans les plus riches gagnaient au moins 5.5 fois plus que les 10% des
artisans les plus pauvres. De même, le taux de pauvreté est le plus élevé chez les
indépendants, ¼ des agriculteurs étaient pauvres en France en 2007,
c’est-à-dire inférieur à 60% du revenu médian. C’est le seuil de pauvreté
(1000€ par mois). Environ 14% des Français sont pauvres aujourd’hui.
è Malgré
le fait que les prélèvements obligatoires soient majoritairement payés par les
riches et que les revenus de transfert soient majoritairement perçus par les
pauvres, les inégalités de revenu sont supérieures aux inégalités de salaire à
cause des revenus du capital. Les inégalités ont donc tendance à se
cumuler : les salariés les plus riches peuvent épargner et donc générer
des revenus du capital supplémentaires.
Ø
Inégalités de patrimoine
Le patrimoine représente
l’ensemble
des biens et titres qu’un individu possède. Ces propriétés vont générer de
l’argent où permettre à l’individu d’en économiser. C’est ce qui prend de
la valeur au cours du temps (maison,
œuvres d’art).
Les patrimoines
sont les plus élevés chez les indépendants. Cela provient généralement
des héritages
reçus des générations précédentes. Le patrimoine s’accroit de génération
en génération.
Le patrimoine des
professions libérales s’est constitué grâce à leurs revenus importants qui
leur assure une forte capacité d’épargne et qui leur permet de se constituer un
patrimoine.
Les inégalités économiques sont
cumulatives : les inégalités de revenu génèrent des inégalités d’épargne
qui entrainent des inégalités de patrimoine et à nouveau à des inégalités de
revenu (cercle vicieux).
Le rapport
interdécile du patrimoine est d’environ 70 aujourd’hui. Les 10% des Français
les plus riches ont un patrimoine au moins 70 fois supérieur aux 10% des plus
pauvres.
2- Les
pays les plus riches sont moins inégalitaires que les pays pauvres
Les pays les plus
égalitaires sont les pays scandinaves ainsi que certains pays d’Europe de l’est.
La France
et l’Allemagne sont dans la moyenne. Les pays les plus inégalitaires
sont la Turquie, le Mexique, le Chili, c’est-à-dire des pays moins
développés que les pays les plus égalitaires.
Les pays les plus
inégalitaires sont les pays en développement (en Asie ou en Afrique).
Pour
constater ces inégalités on utilise le coefficient de Gini et les courbes de Lorenz.
B-
Des inégalités sociales
Ø
Les inégalités femme/homme
On distingue plusieurs types
d’inégalités homme/femme :
-
Dans la sphère privée (au sein du foyer) : la répartition des tâches domestiques
est inégale. Les femmes y passent 1.5 fois plus de temps que les hommes,
principalement à effectuer des tâches ménagères (ménage, cuisine, linge) et s’occuper des enfants. Les hommes
passent plus de temps que les femmes au bricolage, jardinage.
-
Dans la sphère publique. - Les inégalités professionnelles.
Les femmes
sont moins payées (environ 15% de moins) que les hommes. Les femmes sont
plus souvent à temps partiel. Elles occupent plutôt les postes en bas de la
hiérarchie, les hommes occupent les postes en haut : on appelle
cela de la ségrégation verticale à l’emploi ou plafond de de verre. Elles font
moins souvent parti des instances dirigeantes des entreprises. – Il existe
aussi les inégalités dans la vie politique. Les femmes occupent moins souvent des
mandats électoraux (maire, député,
président) mais des postes politiques moins valorisés dans les
domaines de la culture, de la santé ou dans l’environnement.
è Les
inégalités dans la sphère publique s’expliquent en partie par les inégalités
dans la sphère privée. Si la répartition des tâches était plus égalitaire, les
femmes pourraient plus s’investir dans la sphère publique.
Ø
Les inégalités face à la santé/à la mort
En France,
de 2000 à 2008, un homme cadre de 35 ans pouvait espérer vivre encore 47.5 ans.
Chez les ouvriers, cette espérance de vie n’était que de 40.9 ans. Les hommes
cadres vivent donc 15% plus longtemps que les hommes ouvriers à 35 ans.
Ces
inégalités peuvent face à la mort peuvent s’expliquer :
-
Les ouvriers renoncent plus souvent aux soins que les cadres (faute
d’argent).
-
Le travail des ouvriers est plus usant que le travail
des cadres.
-
Les ouvriers ont des comportements plus à risque que les
cadres (tabac, alcool).
-
La culture des ouvriers ne les poussent pas à se plaindre et à
aller régulièrement chez le médecin.
Il existe aussi une inégalité d’espérance de vie entre les hommes et les femmes puisqu’elles
vivent en
moyennes 6 ans de plus que les hommes.
Ø
Les inégalités ethniques
En 2009 en
France, 16% de la population active immigrée était au chômage contre seulement
8.5% pour la population non immigrée. En 2002, 27.2% des enfants d’immigrés
étaient au lycée général contre 39.7% des enfants de parents non immigrés.
Ces
inégalités s’expliquent par :
-
Les discriminations ethniques.
-
Le niveau de diplômes atteints est plus faible, la maîtrise de
la langue est moins bonne.
-
Les inégalités de revenu entre immigrés et non immigrés conduisent
à des inégalités
de logement (surpeuplement).
Les inégalités scolaires (moins de
réussite) contraignent à occuper des postes moins valorisés (ouvrier).
Ø
Les inégalités scolaires
En France,
14% des diplômés à bac +5 ont des parents ouvriers ou inactifs alors que 42%
des bac +5 sont des enfants de cadres supérieurs/professions libérales.
è Plus
les études sont longues et difficiles, plus les milieux favorisés sont
représentés et inversement pour les milieux défavorisés. L’orientation scolaire
est donc inégalitaire en France.
Ø
Les inégalités culturelles
En 2008,
10% des cadres français regardaient plus de 20heures/semaine la télévision
alors que cela concernait 49% des ouvriers.
Ces
différences d’utilisation de la télévision peuvent être perçues comme des
inégalités lorsqu’on sait que ce loisir est dévalorisé dans notre société et
qu’il est principalement utilisé comme un moyen de divertissement et non pour
accéder à une culture savante.
è Plus
généralement, les pratiques culturelles valorisées sont essentiellement le fait
des catégories supérieures (lecture,
théâtre, exposition). Les pratiques culturelles dévalorisées
représentatives des catégories populaires (télévision).
Une différence se transformera en inégalité dès lors qu’elle donnera
à certains des avantages par rapport à d’autres. Les inégalités sont
donc potentiellement innombrables.
C-
Les inégalités se cumulent souvent
Bourdieu
analyse la structure sociale à partir de 3 formes de capitaux :
-
Le capital
économique : il
représente l’ensemble des richesses financières d’un individu.
-
Le capital social : ensemble des relations sociales qu’un individu peut utiliser en
sa faveur (piston).
-
Le capital
culturel : ensemble des
connaissances, savoirs que possède un individu grâce à ses études et à ses
pratiques culturelles.
Le capital social des milieux favorisés peut être utilisé par les parents
pour permettre
à leurs enfants de progresse dans la hiérarchie. En effet, leurs
relations les amènent à connaître des individus capables de leur proposer l’entrée
à des écoles prestigieuses/des emplois valorisés. Les cadres pourraient donc
plus facilement pistonner leurs enfants que les ouvriers (qui n’ont pas
ces relations).
è Une inégalité de capital
social conduit à une inégalité d’insertion professionnelle.
Les inégalités conduisent très
souvent à un cercle vertueux (pour les milieux favorisés) ou à un cercle vicieux
(pour les milieux défavorisés).
En effet, un revenu élevé permettra d’obtenir un logement spacieux dans
un beau quartier. Les enfants pourront donc travailler au calme et étudier dans
des écoles bien classées. Les enfants auront accès à la culture valorisée. La
réussite scolaire probable de l’enfant se traduira par un accès à un emploi
valorisé qui lui assurera un bon revenu.
On parle de reproduction sociale, d’hérédité
sociale ou encore d’immobilité sociale.
Cela signifie que la structure
socio-professionnelle a tendance à se reproduire de génération en génération.
Les enfants de milieux favorisés continueront généralement à appartenir à ces
milieux à l’âge adulte.
è Au final, les inégalités
ont tendance à se cumuler. Une inégalité en entraîne une autre. On dit qu’elles
font système. Elles ont tendance à se renforcer de génération en génération ce
qui creuse les écarts entre les extrêmes (inégalités de patrimoine). La
reproduction sociale est importante dans notre société.
II-
Les différentes théories de la
stratification sociale
A-
Les analyses traditionnelles
1- Pour Karl Marx, la société
est structurée en 2 classes sociales
Pour Marx, les classes sociales ont toujours existé, elles ne sont pas propres au
système capitaliste. Par exemple, elles existaient au Moyen Age entre les
nobles et le tiers-état. Pour Marx, dans toutes les sociétés, des groupes
s’affrontent pour l’accès aux ressources valorisées. Il y a des groupes
dominants et des groupes dominés qui s’échelonnent dans la hiérarchie sociale.
La structure sociale actuelle est
fondée à partir de 2 classes sociales essentielles : le prolétariat
et la bourgeoisie. La bourgeoisie est la classe sociale qui possède les moyens de
production, le capital. Elle n’a pas besoin de travailler pour vivre. A
l’inverse, les prolétaires ne possèdent que leur force de travail pour subvenir à
leurs besoins.
Pour Marx, le système capitaliste tend à
toucher à sa fin. A force d’être exploités, les prolétaires vont renverser la
bourgeoisie et mettre en place une dictature : une collectivisation
des moyens de production, une réduction importante des inégalités qui fera
disparaître
le système des classes sociales, c’est l’ère du communisme.
Pour définir une classe, on se base
sur 2 critères :
-
Une classe sociale est
d’abord une classe en soi.
Les groupes occupent des positions opposées dans le système de production (propriétaire/non propriétaire). Les rapports de
classes seront donc conflictuels. Les bourgeois cherchent à maximiser
leurs profits, les prolétaires cherchent à survivre (hausse des salaires).
De fortes inégalités économiques existent donc dans la société.
-
Une
classe
sociale est aussi une classe pour soi. Les individus ont conscience d’appartenir
à un groupe particulier, ils connaissent et ressentent leur position
dans la hiérarchie sociale.
Au final, les classes sociales existent réellement pour
Marx. Elles ne sont pas une simple construction des sociologues et des
économistes.
2- Pour Max Weber, la
stratification a 3 dimensions
Le concept de classes sociales chez
Weber a des points communs avec celui de Marx : les individus d’une
même
classe partagent une place commune dans le système de production. Comme
chez Marx, les classes sont fondées sur un critère économique. Cependant,
Weber y ajoute un critère social : les classes n’ont pas la même culture, le
même mode de vie.
Les classes n’existent
pas réellement, elles ne sont qu’une construction des sociologues :
les individus ne se sentent pas d’appartenir à telle ou telle classe.
Les groupes de statut regroupent des individus avec des valeurs,
cultures communes leur permettant d’atteindre un certain prestige social. Les
individus
ressentent à quel groupe de statut ils appartiennent aux yeux de la
société (leur place est-elle enviable ou non).
Weber propose une approche pluridimensionnelle où chacune est indépendante des autres.
Il rend ainsi mieux compte de la complexité des sociétés. Ainsi, être en haut dans une
dimension n’implique pas d’être en haut dans les autres et inversement (éboueur -> en bas dans les groupes de
statut mais au milieu dans les classes sociales/les dirigeants de maisons
closes -> en haut des classes sociales mais en bas dans les groupes de
statut).
La troisième dimension de la
stratification sociale est celle de partis politiques : groupes
d’individus cherchant à prendre/influencer le pouvoir en sa faveur.
B-
Les prolongements contemporains
1- Distinction et imitation
selon Bourdieu
Bourdieu distingue essentiellement 3 classes sociales : populaire, moyenne,
supérieure.
Chaque classe partage des capitaux culturels, sociaux et économiques plus ou
moins identiques. Les classes supérieures sont favorisées au niveau de ces
capitaux, les classes populaires beaucoup moins.
Les classes supérieures, pour assurer leur
prestige social, cherchent en permanence à se distinguer des autres classes.
Ils dicteront
à la société les pratiques valorisées (opéra, musée, polo).
Les classes moyennes cherchent sans cesse à rattraper les classes supérieures en
imitant leurs pratiques (théâtre
de boulevard, tennis, golf) et veulent se distinguer des classes populaires
pour ne pas être comparées à une classe qu’elles jugent inférieure.
Les classes
populaires ont tendance à s’auto exclure de ce jeu de distinction/imitation. Elles ne cherchent pas à maitriser ces codes culturels
et se contentent d’une culture de masse dévalorisée (télévision, variété, spectacles sportifs).
Des inégalités d’alimentation émergent
entre les classes : foie
gras/schmirwurst, plats raffinés quantités réduites/plats en abondance. De
même au niveau
du logement : grande
villa/appartement HLM. Ainsi que des inégalités dans le tourisme : hôtel ****/camping, Gstaad/La Plagne.
L’approche de Bourdieu semble plus proche
de celle de Weber car elle est pluridimensionnelle
et aussi car ces classes n’existent pas réellement, elles sont
une facilité
de classement. On parle d’approche nominaliste. Les classes
ne s’opposent
pas que sur le type de biens et services consommés mais aussi sur la manière de
le faire (souvent en retenue pour
les milieux supérieurs, de manière plus grossière pour les milieux populaires).
2- PCS : une construction
statistique (professions et catégories socio-professionnelles)
Les PCS sont une nomenclature, un
classement
sur des critères objectifs, c’est un outil statistique construit par les
sociologues dans lequel les individus ne se sentent pas appartenir à un groupe
particulier.
Ø 1er critère : le
statut professionnel :
-
Les
indépendants : 1. Agriculteur exploitant
2. Artisan, commerçant, chef
d’entreprise
31. Professions libérales
- Les salariés : 3. Cadre 4. PI
5. Employé 6. Ouvrier
Ø 2ème critère : le
secteur d’activité :
-
Pour
les indépendants : secteur primaire 1, secteur secondaire 2, secteur
tertiaire 2/31
-
Pour
les salariés : secteur secondaire 6, secteur tertiaire 3/4/5
Ø 3ème critère : le niveau
d’études/de qualifications :
-
Niveau
élevé (>bac+3) : 3 (ingénieur,
chirurgien)
-
Niveau
moyen (<bac+2) : 4 (infirmier,
techniciens)
-
Niveau
faible (< bac) : 5 (vendeur,
secrétaire)
Les PCS n’ont pas pour objectif
de discuter des classes sociales (pas de sentiment d’appartenance comme
chez Marx, pas plusieurs dimensions comme chez Bourdieu).
Cependant on retrouve indirectement les classes sociales dans les PCS (classes supérieures = cadres/classe moyenne
= PI et employés ouvriers qualifiés/classe populaire = ouvriers employés non
qualifiés).
On peut remarquer un déclin des catégories 1 et 2 depuis les
années 1950 ainsi qu’un déclin chez les ouvriers (6) depuis les années
1970/1980. A l’inverse, une expansion des catégories 3,4 et 5 depuis les
années 1970.
III-
La dynamique de la stratification sociale
Aujourd’hui, les sociologues définissent les classes
sociales à partir de 3 critères et il faut que les groupes cumulent ces 3
critères :
-
Les
groupes sont inégalement situés dans le système productif (critère Marxiste).
Les inégalités économiques seront importantes entre les groupes.
-
Les
groupes sont marqués par une forte identité culturelle. Les inégalités sociales
sont importantes.
-
Les
groupes sont marqués par une forte identité collective. Les individus ont le
sentiment d’appartenir à un groupe particulier.
A-
Moyennisation ou polarisation de la société ?
1- Une tendance à la
moyennisation au cours du XXème siècle
Ø Le premier critère de la définition
des classes sociales est-il d’actualité ?
Depuis les années 1960/70, les
inégalités économiques ont tendance à décliner. En 1970, le rapport
interdécile était de 4.6 alors qu’il était de seulement 3.5 en 2008. Les inégalités
économiques se sont particulièrement réduites pendant les 30 glorieuses
(1950-1980). Depuis les années 1970, les inégalités économiques ont stagné.
è Les inégalités économiques
entre les groupes sociaux se sont réduites. Il ne semble pas possible de
pouvoir parler de classes sociales sur la deuxième partie du XXe. La place des
individus dans le système productif tend à se rapprocher :
-
Diminution du nombre
d’ouvriers non qualifiés.
-
Mise
en place du
SMIG (1950) puis du SMIC (1970) salaire minimum interprofessionnel
garanti/de croissance.
-
Généralisation de
l’Etat providence à
travers la sécurité sociale allocations maladie, familiale, retraite et allocations
chômage.
Ø Le deuxième critère de la définition
des classes sociales est-il d’actualité ?
Tous les ménages ont aujourd’hui accès aux
biens durables de base (frigo,
télé, voiture, téléphone). Les conditions de vie des Français ont tendance à s’homogénéiser.
Le taux
d’équipement de ces biens est aujourd’hui saturé. On parle de démocratisation de l’accès au confort de base puisque de plus en plus de
ménages ont des conditions de vie correctes.
On assiste également depuis les
années 1950, à une démocratisation scolaire. De plus en plus d’enfants
font des études
longues. L’école permet de transmettre une histoire, une langue, une culture, des
références et des valeurs communes.
De même, les styles vestimentaires
s’homogénéisent. Pour Mendras, le jean et le barbecue sont les symboles de la
moyennisation de la société, c’est-à-dire de l’émergence d’une vaste classe
moyenne où se retrouvent de nombreux cadres, professions intermédiaires
et de certains ouvriers et employés. Mendras parle de constellation
centrale. Pour lui, la société a pris la forme d’une toupie.
https://images.schoolmouv.fr/ses-terminale-cours-13-img04.jpg
Cette constellation
centrale est composée d’individus partageant plus ou moins une culture semblable
et des conditions de vie homogènes.
è Les inégalités culturelles
et sociales se sont peu à peu estompées depuis la fin de la 2 Guerre Mondiale.
Les écarts entre les extrêmes se réduisent dans tous les domaines.
Ø Le 3ème critère de la
définition des classes sociales est-il d’actualité ?
Les Français se sentent de moins en
moins appartenir aux extrêmes de la société. 65% se classent dans une
catégorie moyenne. Si on y ajoute la catégorie populaire, plus de 85% des
Français se sentent plus ou moins moyens. Les classes extrêmes tendent à disparaitre :
une seule
et vaste classe moyenne perdure. Elle ne s’oppose à aucune autre.
On ne peut pas véritablement parler de classes sociales (selon la théorie de Marx).
è Il ne semble pas possible,
depuis la fin de la 2 Guerre Mondiale, de parler de classes sociales en France.
Aucun des 3 critères de la définition n’est d’actualité. On parle de
moyennisation de la société ou de fin des classes sociales.
2- Assiste-t-on à un retour
des classes sociales ?
Ø Le 1er critère de la
définition des classes sociales est-il aujourd’hui de retour ?
Depuis le début du XXIème siècle, les
inégalités
économiques tendent à ré augmenter. En 2008, en France, le niveau de vie
des 10% des plus riches est au moins 3.5 fois supérieur à celui des 10% des
plus pauvres. Des inégalités économiques fortes semblent réapparaître. Par
ailleurs, les inégalités de patrimoine sont toujours restées très importantes et ont eu
tendance à s’accroître dans les années 2000 avec l’essor de la bourse (placements).
En 1955, en France, il fallait aux
ouvriers 29 ans pour atteindre le niveau de vie des cadres compte tenu
de l’augmentation des salaires (pendant ce temps, le niveau de vie des cadres
va aussi augmenter). Seulement 29 ans d’écart de niveau de vie entre cadres et
ouvriers laissaient un fort espoir aux ouvriers de voir leurs conditions de vie
s’améliorer durant leur vie professionnelle. En 1955, le salaire moyen
des cadres était 3.9 fois plus élevé que celui des ouvriers. De 1950 à 1955, le
pouvoir d’achat moyen des ouvriers a augmenté en moyenne de 4.8% par an. La
moyennisation semble incontestable, le rapport est passé de 3.9 à 2.7, les
inégalités économiques baissent.
Cependant la dynamisation de ces inégalités est
totalement défavorable aux ouvriers. Leur temps de rattrapage du niveau
de vie des cadres a explosé à cause de la quasi-stagnation de leurs salaires,
il leur faut aujourd’hui 170 ans pour rattraper le niveau de vie d’un cadre.
C’est un gouffre dans lequel les ouvriers ne peuvent se projeter : ni eux, ni
leurs enfants ne connaitront les conditions de vie d’un cadre d’aujourd’hui.
è Les inégalités économiques
semblent de retour, le 1er critère de la définition des classes
sociales semble à nouveau pertinent.
Ø Le 2ème critère de la
définition des classes sociales est-il de retour ?
Les inégalités sociales et culturelles n’ont pas
disparues :
-
Les
cadres
partent 2 fois plus régulièrement, plus longtemps en vacances que les ouvriers et
prennent aussi plus souvent l’avion.
-
Les inégalités de
logement persistent. Les
plus pauvres vivent plus souvent dans un logement surpeuplé que les plus
riches.
-
Les inégalités d’accès
à la culture valorisée sont encore d’actualité, les catégories favorisées vont plus régulièrement au
musée, à l’opéra et lisent plus souvent.
-
Les inégalités
scolaires restent très marquées : l’école ne parvient pas à faire sortir les enfants de leur
milieu (catégories populaires). L’échec scolaire sera important pour ces
enfants, on parle plutôt de massification scolaire pour dire que tous les
enfants vont à l’école mais il n’y a pas véritablement de démocratisation
scolaire ce qui laisse penser que tous les enfants ont accès à tous les types
d’études. Ce qui n’est pas du tout le cas dans les faits.
è Les inégalités culturelles
et sociales perdurent. On peut y ajouter également la dynamique de
distinction/imitation de Bourdieu : même lorsqu’une activité est pratiquée
par toutes les catégories, elle ne l’est pas de la même manière (cinéma, télévision, vacances…). Le 2ème
critère de la définition semble d’actualité aujourd’hui.
Ø Le 3ème critère de la
définition des classes sociales est-il aujourd’hui de retour ?
De plus en plus d’individus ne se sentent pas appartenir à
une classe sociale. Et s’ils disent
appartenir à une c’est très souvent la classe moyenne. Il semble impossible de
conclure aujourd’hui à un retour du sentiment d’appartenance à des classes
sociales. Cependant le sentiment d’appartenance tend à ré augmenter
faiblement.
è Il semble que nous ne
pouvons pas parler de retour des classes sociales à l’heure actuelle puisque le
3ème critère n’est pas respecté. Objectivement, les inégalités
économiques et sociales sont importantes mais les Français n’en ont pour
l’instant pas conscience : peu se sentent défavorisés, favorisés.
B-
Des frontières de plus en plus brouillées du fait de la multiplication des
critères de différenciation sociale
Le déterminisme de classe est une expression montrant l’importance de
la reproduction sociale : les enfants seraient contraints par leur
origine sociale, les enfants de catégorie populaire feraient encore partis de
la classe populaire, de même pour les enfants de classes favorisées. Ce déterminisme
semble s’affaiblir avec la mise en évidence de nouvelles inégalités qui
vont complexifier la lecture de la société en termes de classes sociales. Les frontières
entre les classes seraient moins imperméables, elles auraient tendance à être
brouillées.
En plus de la problématique de
l’existence ou non des classes sociales, l’analyse de la structure sociale s’est complexifiée
ces années, les sociologues ayant fait émerger des inégalités transversales. Celles-ci traversent les différentes
catégories sociales et brouillent la lecture en termes de classes sociales.
Les inégalités homme/femme traversent
toute la société et ont tendance à former deux groupes : homme
dominant/femme dominée. Cela se répercute avec les groupes de classes
aisées/classes populaires.
Les inégalités territoriales
traversent aussi les catégories sociales : certaines régions sont plus
attractives/dynamiques que d’autres.
è Si les classes sociales
existent, elles sont moins affirmées que par le passé du fait de l’existence de
ces inégalités transversales multiples.
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