États-Unis Brésil, rôle mondial
Baisse du
prix du pétrole en 2015. Beaucoup attribuent aux USA le mérite de cette
tendance, grâce aux gaz de schiste. Mais le rôle du Brésil est également
souligné : grâce à ses gisements offshores et ses agrocarburants, le Brésil
présente une offre nouvelle et inédite. Cela prouve que ces deux géants
territoriaux jouent un rôle mondial dans de nombreux secteurs : économique,
politiques, culturels. Quel est le rôle
dans le monde des deux puissances américaines, les États-Unis et le Brésil ?
Peut-on comparer le rôle mondial des USA, superpuissance planétaire, avec celui
du Brésil ? Après avoir vu que les 2 puissances jouent un rôle comparable au
niveau géographique, économique et culturel, on verra que le rôle des
États-Unis est sans commune mesure avec celui plus effacé du Brésil.
I.
Deux pays qui jouent un rôle mondial au niveau géographiques, géoéconomiques
et géoculturels
A.
Au niveau géographique
: des pays immenses
Des
superficies comparables : 8.5 M de km² pour le Brésil et 9.3 pour les USA, dont
19% du territoire est occupée par l'Alaska au climat ingrat. Donne deux points
forts :
-
Un potentiel d'espace énorme : contrairement
au Canada, à la Chine et à la Russie qui disposent de territoires vides essentiellement
dans des contrées hostiles, ces deux pays ont de l'espace dans des régions au
climat tempéré : les Prairies des USA, la région du centre du Brésil → cet espace confère de l'importance, car les pays qui ont de l'espace
vierge sont devenus rares.
-
Un potentiel de richesses naturelles fabuleux
: fer, or, pétrole au Brésil, charbon et pétrole aux USA →rôle au niveau de l'offre de matière première
B. Au niveau géoéconomique : FTN, exportations agricoles
De grandes
FTN : Petrobras, 4° compagnie pétrolière mondiale, Embraer, Globo : Brésil,
pays de FTN dynamiques. Les entreprises brésiliennes ont contribué au
développement du PIB de ce pays. La quantité de pauvres a beaucoup diminué dans
ce pays depuis 30 ans. Idem pour les USA, présents dans les industries
traditionnelles (GM, EXXON) et high-tech (entreprises informatiques du type
"Amazon".).
Un potentiel agricole énorme : ces
pays sont des géants agricoles : céréales des pays tempérés aux USA n°1
mondial en maïs, soja et blé (n°4 seulement pour le blé), plantes
tropicales au Brésil : soja, maïs, fruits tropicaux. Ces deux pays sont des
géants de l'exportation mondiale → rôle de l'arme verte.
Ces
deux pays exportent leur agriculture vers la Chine, le Japon, la Russie et l’UE
Au Brésil, décuplement des exportations vers l'Asie entre 2000 et
2014 → un moyen de pression pour les USA et le Brésil
sur de « gros clients » = 2 secteurs agricoles très modernes,
fortement tournés vers le marché mondial.
Deux géants de l’agrobusiness :
la malbouffe US (Mars, Mc do) d’une part, les produits tropicaux brésiliens
d’autre part. Résultat de l’émergence du Brésil : il est à son tour vu comme un
pays impérialiste. Il agace ses petits voisins : Uruguay, Paraguay et Bolivie.
C.
Au niveau
géostratégique
2 pays qui
ont récemment conquis leur indépendance énergétique : le Brésil a exploité des
gisements offshores (90% de la production pétrolière) + a développé des
agrocarburants + Brésil géant mondial de l'hydroélectricité (n°1), grâce au
Barrage d'Itaipu. Résultat : le Brésil parvient à exporter de l'énergie,
surtout vers la Chine et l'Inde. Cette politique se fait au détriment des
terres amérindiennes en Amazonie, qui souffrent de la construction de ces
barrages.
USA aussi ont lancé une politique de
développement des gaz de schiste. Forte hausse de la production et les USA sont
devenus en 2014 le 1° producteur mondial d'hydrocarbures, devant l'Arabie
Saoudite. Ces pays proposent une alternative à l'offre d'hydrocarbure venue du
Moyen-Orient.
Résultats : les USA et le Brésil
sont des géants économiques mondiaux, au niveau agricole, industriel et
énergétique
D. Au niveau
géoculturel : une volonté de rayonnement
Soft power US bien connu : la langue, la
nourriture, la musique et un cinéma au
succès inégalable + Les spectacles de Broadway, la créativité dans les arts,
les œuvres de Roy Lichtenstein ou d’Edward Hopper.
Points communs : le Brésil est également
très fier de sa culture : ses telenovelas exportés dans les pays du
Sud : programmes tv moins couteux que les productions hollywoodienne, axés
sur des histoires sentimentales complexes. Evoquons aussi le succès des musiques
latinos. Pour avoir au moins une référence culturelle, j'évoque le célèbre "Chico Buarque"
avec Essa
Moça Tá Diferente ou si vous
préférez : "Gilberto Gil» : Toda
menina Bahiana . Il y a aussi le carnaval, le football, et, pour des raisons
inexplicables, le beach volley féminin qui contribue à la notoriété du Brésil.
Evoquons enfin le poids croissant de la langue
portugaise, forte de près de 250 millions de locuteurs à travers le monde, dans des pays prometteurs comme l'Angola. On
parle d'un cercle de pays "lusophones", dont le Brésil est le fer de
lance.
Images de Rio (Copacabana, pain de sucre,
Christ du Corcovado) célèbres dans le monde entier. En définitive, le Brésil bénéficie d’une image très positive,
notamment dans les pays du Sud.
II. Des différences au niveau de l'importance du rôle mondial
joué
A. Au niveau politique
et militaire
Le déséquilibre
est flagrant : Du point de vue
militaire, Poids US = 45% du poids militaire mondial. L'armée US a joué un actif tout au long du
XX° siècle : Les USA ont participé aux Guerres mondiales, aux guerres en Yougoslavie, Irak, Afghanistan .... L'armée US
intervient moins à l'extérieur depuis la mésaventure irakienne, mais le
potentiel reste là.
Au contraire, Brésil = armée limitée. Un
budget militaire d'à peine 22 milliards de dollars, soit 2 X moins que la France,
et surtout 25 X moins que les USA. Et surtout, une armée qui n'intervient dans
aucun conflit (contrairement à la très active armée française), or, une armée
n'acquiert de la crédibilité que lorsqu'elle va "sur le terrain".
Du point de vue politique, la
notoriété internationale du chef d'État brésilien Michel Terner est plutôt faible.
La prédécesseur de Michel Terner, Dilma Rousseff était très contestée dans son
pays, à cause de scandales de corruption à répétition, au point de subir un
vote de destitution, au mois de juillet dernier. De plus, le Brésil n’a pas de siège permanent au conseil
de sécurité de l’ONU, qui lui permettrait de jouer un rôle diplomatique de
premier plan. En clair, le Brésil a un rôle avant tout régional, prépondérant
sur le continent sud-américain, mais sa voix ne porte pas au-delà de la sphère
latino-américaine.
Au contraire, présence des USA devenue
indispensable sur toutes les grandes questions internationales. La voix d'Obama
portait et avait de l'impact. Quand les USA menaçaient un pays de sanctions, ils étaient influents. Idem quand
ils décident de combattre les paradis fiscaux. Quant à Donald Trump, plus déroutant,
on peut dire que le moindre de ses faits et gestes est épié. Les quelques décisions qu'il a déjà
prises depuis qu'il est au pouvoir
(fermetures des frontières pour les ressortissants de pays tels que
l'Iran ou le Soudan) ont été très commentées.
B. Au niveau économique et financier
Concernant
le poids économique : poids du PIB US
nettement supérieur à celui du Brésil (18000 milliards de $ contre 2000 pour le
Brésil = rapport de 9 à 1) Autant de différence que le rapport France / Pakistan.
Il y a quelques années, le différentiel était seulement de 6 à 1.
Concernant la puissance financière :
Bourses et technopôles des USA ont une place majeure, sans commune mesure avec celles du Brésil + rôle du dollar alors
que la plupart des gens sont incapables de citer la monnaie brésilienne, (le real) qui est moins célèbre que le franc
suisse ou le won coréen. Idem pour les banques : celles des USA (Goldman Sachs)
ont un rayonnement mondial. Le rôle de la bourse de São Paulo est limité : ne fait même pas partie
des 10 principales places boursières mondiales (= derrière Zürich)
Concernant la croissance économique : Les
BRICS seraient-ils un mirage ? Brésil
connaît crise économique, et les
tensions sociales sont à nouveau fortes. Cela s’est vu pendant la coupe du
monde et ça s’est encore amplifié en 2015-2016. Crise économique et politique. Au contraire, les USA connaissent une forte
croissance grâce aux gaz de schiste, même si cette croissance est sans doute
éphémère. Croissance supérieure au Brésil depuis 2012.
Concernant le niveau de vie : Une vaste
proportion de la population brésilienne vit dans des favelas. La pauvreté aux USA
n'atteint pas les mêmes proportions. Chiffe du PIB par habitant montre une
différence énorme : 2013 : 56 000 $ pour
les USA, 44 000 pour la France, 9 000 pour le Brésil, situé entre le Gabon et
la Turquie ! Idem pour l'espérance de vie, considérée pourtant comme le point
faible des usa : 83 ans pour la France, 79 ans pour les USA (mauvais score pour
un pays développé, à cause de la difficulté pour les plus pauvres à bien se soigner),
74 ans au Brésil: = moins que la Libye ou la Tunisie (75 ans).
C. Des différences au
niveau du soft power
1. Meilleur rayonnement intellectuel
Les universités étasunienne attirent plus et sont
plus cotées au classement de Shanghai. + Meilleur niveau de recherche, + rayonnement
des prix Nobel, nombreux et inventifs, dans tous les domaines. USA attirent chercheurs et talents venus du monde entier.
Depuis 1901, 40% des prix Nobel sont américains, alors que les P Nobel Brésiliens sont rares. Beaucoup de gens sont
capables de citer des noms d'inventeurs ou d'ingénieurs américains (Henry Ford,
Bill Gates, Steve Jobs, Elon Musk). L'Americain way of life fait des USA le 1°
pays mondial pour l'immigration.
2. Meilleur rayonnement
culturel
La culture
brésilienne va se limiter à l'aire de l'Amérique du Sud (exemple : Paraguay,
polarisée) et des pays lusophones : Portugal et Angola. Idem pour les musées,
les villes : LA, Chicago et NY bénéficient d'une notoriété supérieure. Les
2 fiertés culturelles du Brésil sont fragiles : le carnaval de Rio est
exceptionnel, mais on parle autant de la violence des gangs, qui ternissent la
fête, que de la beauté des spectacles. La
Coupe du monde a abouti à un résultat paradoxal en 2014 : on attendait un jeu
brésilien magnifique et une organisation défaillante, et c'est l'inverse qui
s'est produit. Le « football de rêve » des Brésiliens est un peu cliché.
Le Brésil est certes une « très
bonne équipe », mais ses clubs n'ont pas la renommée internationale des
clubs européens. A l'inverse, l'équipe étasunienne de basket justifie sa
réputation à chaque tournoi depuis des décennies. Les USA gagnent beaucoup plus
de médailles aux JO que le Brésil, dont aucun sportif n'est célèbre, en dehors
de la sphère du ballon rond.
Nous avons
donc vu que ces deux pays, de taille et de population semblables, étaient
d'indiscutables géants mondiaux, notamment sur le plan économique, et
culturels. Ils disposent en commun de l'arme verte qui donne l'impression que
ces deux géants seraient capables
d'alimenter une bonne partie de l'humanité en nourriture, en profitant de leurs
larges espaces. Pourtant, les différentes sont flagrantes : les États-Unis sont
une hyperpuissance, tant au niveau militaire, politique, économique,
scientifique et culturel, alors que le Brésil doit se limiter à une influence
et à une notoriété d'importance régionale.
Ces deux pays partagent en commun une
vision angoissée d’un avenir qui semble promis à la Chine : le Brésil s'enfonce
depuis 3 ans dans la pire crise économique de son histoire. Quant aux USA, ils
sont embarqués dans une aventure inquiétante avec leur nouveau chef d'État
imprévisible. Peut-on faire le pari que ces deux pays sauront s'extirper de la
nasse dans laquelle ils sont tombés, tant leur dynamisme et leur potentiel
géographique les rend fascinants ?