Le Sahara
: ressources, conflits
La prise d’otage d'In Amenas : En plein cagnard, dans un des bleds les
plus hostiles du monde, se trouve le site gazier d’In Amenas, vital pour
l’économie algérienne : représente 18% des exportations de gaz de
l’Algérie ! Emploie de nombreux ingénieurs venus des pays occidentaux.
Site victime d’une prise d’otage meurtrière en janvier 2013 : plusieurs
dizaines d’otages tués. Prouve que l’exploitation des richesses au Sahara se
heurte à des difficultés climatiques et politiques. Le Sahara est un espace
gigantesque de + de 9 millions de km² (16 X la France), débordant sur dix pays.
Longtemps, délaissé, il était autrefois l’espace des nomades, Toubous ou Touaregs, qui
se déplaçaient péniblement en convois, d’une oasis à l’autre. Mais avec le
développement des transports et de la mondialisation, l’approche de cet espace
hostile s’est modifiée : des ressources naturelles y ont été découvertes,
en même temps que les progrès de la technologie permettaient de mieux exploiter
les nappes d’eau de ce vaste territoire. Le Sahara est alors devenu une source
prometteuse de profit. Mais cette nouvelle richesse a entrainé des convoitises,
qui ont dégénéré en de nouveaux conflits,
de sorte que le Sahara est devenu au fil des années un des points noirs de la mondialisation.
Quelles sont les ressources du Sahara et quelles sont les tensions qui l’affectent ?
I.
Un
espace de fortes contraintes physiques, mais disposant d'importantes ressources
convoitées
A. Un espace
contraignant
La limite
correspond à la région dont la pluviométrie est inférieure à 100 mm = frontière
aléatoire. La limite nord = l’espace méditerranéen.
La limite Sud = le Sahel, un paysage steppique, mais peuplé, de transition
entre le sable et la savane : Au Sahel, on remarque une dégradation régulière des
conditions de vie liée à la sécheresse
(Tchad, Mali).→ De plus, les pays du Sahel sont souvent enclavés (Tchad,
Niger), ils ont peu d’atouts dans la mondialisation.
Où qu’on
aille, la région souffre d’une quasi-absence de pluie : stress hydrique
permanent. Les rares pluies tombent de façon aléatoire, sous forme
d’orage. L’agriculture classique y est donc impossible. De plus, chaleur
suffocante l’été : pics à 40° de moyenne l’été avec des pointes à 58°,
enregistrés au sud de l’Égypte et au sud de la Libye = les 2 endroits les plus
chauds du monde.
Le paysage
est pelé, tantôt des regs, tantôt des ergs, avec des vents chauds (le sirocco) qui
compliquent l’aménagement des infrastructures routières. Comment bâtir des infrastructures,
lorsqu’on sait que le sable se déplace au gré des vents ?
Un milieu hostile, aride, peuplé de
nomades, qui ont longtemps voyagé d’un puits à l’autre. Mais les nomades se
sont sédentarisés. Les nomades sont aujourd’hui minoritaires. Le Sahara abrite
15 millions d’habitants sur 9 millions de km² = 1.6 h/km².
B. Des ressources limitées en eau
L’eau est
présente :
- sous la forme d’oasis, mais ils sont
rares et peuplés.
- Sous la forme de nappes aquifères,
surtout en Algérie et en Libye (beaucoup moins au Sahel). Pompage de la nappe
aquifère (aqueducs) par le gouvernement libyen de l’époque du colonel Kadhafi :
c’était son projet de « Grande rivière artificielle » dans le but
d’acheminer l’eau fossile des nappes du
sud du pays vers le littoral. Projet pharaonique qui consistait à
couvrir le pays de plus de 3 000 km de canalisation, mais projet décrié,
car il a attaqué une source qui n’était pas pérenne.
- En Algérie, Libye, Égypte,
l’exploitation de la nappe, souvent profonde (500 à 800 mètres) permet des
cultures irriguée sous forme de champs circulaires. Cette agriculture moderne
cohabite avec l’agriculture plus classique des « ghouts »
(mini-jardins), le long des oasis naturels.
- Le dessalement. Déjà exploitée par
l’Algérie, la Libye et l’Égypte ; solution envisagée par le Maroc en 2016
et par la Mauritanie
C. D’importantes ressources
Principale
ressource naturelle : les hydrocarbures : pétrole et gaz en Libye
et en Algérie. Présents également, à un degré moindre, en Égypte et au Soudan. Des phosphates au
Maroc. L’uranium, exploité par la FTN Areva enrichit le Niger, à Arlit, au nord du pays. C’est la
seule richesse minière de cet immense pays désolé. Idem pour la Mauritanie, qui ne peut compter que sur son
gisement de fer, situé au nord du pays, à F’Dérick.
Les richesses du sous-sol sont
destinées à l’exportation, et l’argent de la vente profite à des gouvernements
qui ne redistribuent pas toujours correctement les devises perçues.
II. Un ensemble
politiquement fractionné, mais parcouru par des flux de circulation
A.
Un ensemble fractionné
en 10 États
Un espace séparé entre 10 pays
différents, 5 sur la rive méditerranéenne, 5 sur la bordure du Sahel.
Divisions politiques : Partage hérité de
l’époque coloniale ; Les Empires coloniaux français, italiens, anglais occupaient
le Sahara et avaient tracé, à l’amiable, des frontières, en plein milieu du
désert, sans tenir compte des réalités
locales. Certaines frontières sont aujourd’hui disputées : Exemple : la
bande d’Aouzou, ancienne frontière entre l’Empire colonial français et italien,
aujourd’hui pomme de discorde entre le Tchad et la Libye, d’autant que ce
territoire recèlerait de l’uranium.
Autre problème : l’ancienne
colonie espagnole du Sahara occidental a été annexée par le Maroc, en 1975, au
grand dam du voisin algérien, qui a dénoncé une entreprise coloniale de la part
de son voisin marocain.
B.
Des États confrontées
à des tribus souvent hostiles au pouvoir central
Divisions
ethniques : Le peuplement du Sahara est
formé de tribus arabes et de tribus du désert : Toubous, Touaregs, Maures,
Peuls dont la religion musulmane est le seul point commun. Ces groupes de
nomades vivent en permanence à passe-frontière avec des Etats dans lesquels ils
ne se reconnaissent pas. Le sentiment d'appartenance nationale est différent de
celui de l'Europe. Exemple de la Libye : les populations du désert ont un
sentiment d'appartenance à la tribu bien plus développé que le sentiment
national. Kadhafi supportait (politiquement et financièrement) sa tribu,
originaire du désert, ce qui a provoqué
la jalousie des 20 autres tribus de la Libye.
C. Un ensemble parcouru par des flux de circulation
Jusqu'au
début du XX° siècle, le seul moyen de déplacement était le dromadaire. A partir
des années 1960, le commerce par camion s’est
développé, ce qui a facilité les flux de commerce alimentaire ou
manufacturé sur des pistes chaotiques.
A la fin du XX° siècle, des projets se
développent, ayant pour ambition la construction d'un réseau routier qui
traverse le désert du nord au sud. Ces projets sont bloqués en Libye, du fait
de la situation politique difficile. Le principal chantier se fera donc en Algérie.
Construction
d'une route Alger-Agadez (au sahel nigérien) depuis les années 1980. Route
pavée jusqu'à la frontière avec le Niger. = voie Nord-sud, chargée de relier
entre elles les mégapoles du Nord du Sahara (Alger, Tunis, Tripoli) à celles du
Sahel. (Bamako, Niamey). Construction difficile dans un environnement hostile.
Achèvement prévu en 2017 ou 2018.
Autre
route : Route Gibraltar – Dakar, le long de la côte Atlantique : mais mauvais passage à la frontière Mauritano-marocaine,
à cause de la rébellion indépendantiste des Sahraouis.
Un autre flux concerne le transport
des hydrocarbures : le pétrole et le gaz empruntent le réseau d'oléoducs
qui achemine l’or noir des lieux
d’extraction du Sahara jusqu’aux ports
de commerce de la côte. (Arzew et Skikda en Algérie).
III. Un espace soumis à de
multiples tensions
A. Tensions sociales
Le Sahara reste une région très pauvre :
Commençons
par les 5 premiers pays de la liste, qui sont les pays les plus « riches »,
sur la côte méditerranéenne. La Libye, était la glorieuse exception de cet
espace, (IDH de 0.76) grâce à ces gisements d’hydrocarbures, qui profitaient à
une population peu importante. Mais depuis 2011, le pays a été ravagé par la
guerre civile, qui a plombé l’économie
libyenne. On remarque d’ailleurs sur le
document que, déjà à l'époque, il y
avait 30% de chômeurs ! Il est à noter que les chiffres du chômage, en Algérie,
au Maroc ou en Égypte, qui plafonnent au chiffre « français » de 10%
sont, de l’avis général des experts, largement sous-estimés, et on estime que
là-bas, le taux de chômage doit osciller entre 20 et 30%.
Les 5 autres pays sont ceux du sahel = IDH bas,
voire très bas, souvent inférieure à 0.5 (Niger : 0.29, triste record
mondial) = population désargentée, = population souvent illettrée (une fille
sur 10 va à l’école au Niger) = % important de population qui a faim (59 % des
Tchadiens ne mangent pas à leur faim).
Partout,
qu’on soit au nord ou au sud du désert, les richesses du sous-sol profitent
partout à une minorité, proche du
pouvoir ou à des FTN qui exploitent les richesses à leur profit. Cette situation
engendre des inégalités fortes, génératrices de tensions
(le mot du sujet) : dans les années 2000 à 2010, tandis que les Libyens
vivotaient, Kadhafi était devenu l'un des hommes les plus riches du monde. Le
pétrole a également permis l’enrichissement du FLN, en Algérie, depuis
1962. La majorité de la population de ces pays profite peu des retombées de ces
richesses.
B. Tensions politiques
1° acteur = les gouvernements qui ne parviennent pas à
gérer pacifiquement les conflits. Exemple : Maroc annexe le Sahara
occidental en 1975 → Conflit depuis cette date. Présence de la MINURSO de l’ONU
pour juguler les violences. Conséquences : peu d’IDE vers la zone impactée
par le conflit. Le conflit du Sahara occidental entraîne d'interminables
tensions entre le Maroc et l'Algérie.
2° acteur : les peuples du
désert, sécessionnistes : beaucoup de ces peuples veulent se séparer du pouvoir
central et exploiter les richesses du sous-sol à leur compte. Exemple : les tribus du désert : Toubous de
Libye ou du Tchad et surtout les Touaregs
du Mali, les Sahraouis du Sud du Maroc.
3° acteur : la société civile qui se
révolte contre la dictature = printemps
arabes de 2011, révolte des peuples en Libye, Tunisie, Égypte, mais la
situation devient vite chaotique dans ses trois pays : la Tunisie est en crise,
l'Égypte est au bord de la rupture, et la Libye s'enfonce dans le chaos. Les
printemps arabes ont, en définitive, compliqué la vie des habitants du Sahara.
C. Un nouvel acteur : le terrorisme
islamiste
Émergence
de groupes islamistes divers : AQMI en Algérie, en Mauritanie et au Mali, Boko
Haram au Nord du Nigeria, Shebab en Somalie + les groupes islamistes affiliés à
Daech en Libye et en Égypte. Leur rayon d'action s'élargit d'années en années,
en profitant du chaos qui règne en Libye depuis 2011. Aujourd'hui, le seul
secteur réputé calme est le Maroc (du Nord).
Le risque est que tous ces groupes islamistes s'unissent, autour de la
bannière de Daech.
Conséquence économique : Exemple : Uranium à Arlit, au
Niger, indispensable pour l’industrie nucléaire française. Exploité par le
groupe Areva. Enlèvement en 2010 de 6 ingénieurs français qui ont été
emprisonnés pendant 3 ans dans les geôles d’Al-Qaeda. Depuis cet
épisode, les IDE s'effondrent, les occidentaux n'osent en effet plus investir dans le désert, de peur des
attaques terroristes. Exemple : disparition du rallye Paris-Dakar, qui, a force
de menaces, a décidé en 2009 d’organiser sa course en Amérique du Sud
Conséquence sociale : appauvrissement de la population :
les IDE sont nuls, l'essor touristique a été tué. Exemple : Tombouctou, la plus
belle ville du Mali (et du Sahara), qui vivait du tourisme... La ville
connaît la crise depuis que les
touristes ont disparu, idem en Egypte.
Le travail est alors fourni par Daech ou Aqmi : les terroristes proposent de
lancer des actions terroristes ou de participer à des trafics divers :
cigarettes, drogue, êtres humains.
Conséquence humaine : explosion du flux de migrants vers
l'Europe : les islamistes organisent le
passage vers l'Europe, pour obtenir des capitaux. Avec la fermeture de la Turquie, les flux
migratoires transitent par la Libye, à partir d'avril 2016.
Conséquence
militaire, le Sahara est devenu « un front de guerre contre le
terrorisme »Exemple : «l'opération Barkhane" (3000 ♂ et 20 hélicos) contre AQMI : Les
français empêchent cette région grande comme la France de devenir un sanctuaire
islamiste. → Problème : la France est bloquée là-bas depuis janvier 2013, dans
un espace où les terroristes jouent à cache-cache avec l'armée dans le désert...Le
conflit est bien parti pour durer pendant des décennies.
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