États-Unis-Brésil,
dynamiques territoriales
Usa et
Brésil sont les 2 géants territoriaux du continent américain. D’une superficie
globalement comparable (autour des 9 millions de km²), les 2 pays ont une
histoire un peu semblable : une population en provenance d’Europe pour les
colons blancs et venue d’Afrique pour les esclaves. Dans les deux pays, les
Amérindiens ont été massacrés et
cantonnés dans des réserves. Quant aux Noirs, ils ont été asservis dans des
plantations : sucre au Brésil, coton aux USA. Les migrants ont d'abord
débarqué dans des ports emblématiques de la côte Est : Salvador, puis Rio au
Brésil, New York, aux États-Unis. Ces
villes ont été à chaque fois le point de départ de l' expansion
territoriale des migrants, qui se sont
répandus en auréoles à partir de leur base
de débarquement, ce qui fait qu'aux USA comme au Brésil, pour des
raisons historiques, les fortes densités sont encore de nos jours situées sur
la côte Est. Le cœur du pays est donc toujours localisé sur le littoral Atlantique. Ces pays ont
ensuite profité de l’immensité de leur territoire pour se développer, de façon
extensive d’abord, plus rationnelle ensuite, au cours du XX° siècle. Mais, avec
l’irruption de la mondialisation et avec l’intégration de ces pays dans des
organisations régionales, la dynamique de localisation de la population
évolue : certaines régions du Brésil ou des États-Unis périclitent, alors
que d’autres, boostées par un environnement favorable, se développent. Aussi
pouvons-nous nous demander quelles évolutions connaît aujourd’hui
l’organisation territoriale de ces deux puissances ?
I.
Deux territoires centrés sur la côte est, avec des villes énormes
A.
Des métropoles de rang mondial
1° point commun entre les villes du Brésil et
des USA : importance de la proportion de la population urbaine : 81% aux USA et
85% au Brésil (France 80%). Les petits villages isolés n'abritent qu'une
minorité de la population de ces pays. Ils font un peu partie du folklore du
passé, de l'époque de l'héroïque conquête de l'Ouest.
2° point commun : la taille énorme des
mégapoles. Les métropoles sont souvent situées sur la côte Atlantique : New
York (18 millions d'habitants) , Boston, Washington, Chicago aux USA... São
Paulo (21 millions d'habitants, soit 2 x Paris), Rio, Salvador, Recife, Belo
Horizonte au Brésil.
Ces
villes vont polariser les emplois qualifiés : ingénieurs, chercheurs, avocats (C'est
une des logiques de la métropolisation de concentrer les métiers qualifiés dans
les plus grandes villes).
3°point commun : au niveau des paysages
urbains : CBD au centre, avec des gratte-ciels et des avenues larges, gated
communities et quartiers ghettoïsés autour, et des banlieues pavillonnaires
interminables. Des villes bien plus étendues qu'en Europe, car ces deux pays ne
manquent pas de place. Le foncier est moins cher qu'en Europe.
1° différence
: Gros foyer de métropoles sur la côte ouest des USA : 4 métropoles : San
Diego, Seattle et surtout, San Francisco et Los Angeles... Alors que l'Ouest du
Brésil est un cul-de-sac désertique, ombragé par une forêt équatoriale hostile
: l'Amazonie.
2°
différence : Les métropoles étasuniennes sont davantage intégrées à la
mondialisation : bourse, université, technopôles, aéroports. Seule, São Paulo est
vraiment une métropole de rang mondial au Brésil. Les autres villes sont
davantage des mégapoles : elles sont très peuplées, mais n'ont pas vraiment de
fonction de commandement. Rio, Salvador, Manaus ou Fortaleza.
Autre
différences : la qualité des infrastructures : les métropoles étasuniennes
sont mieux reliées entre elles : meilleures desserte routière, ferroviaire
ou aéroportuaire. Il suffit de comparer les chaotiques routes amazoniennes avec
les highways très larges qui quadrillent
les USA du Nord au Sud, d'Est en Ouest.
B. Des centres
décisionnels historiques qui restent importants:
USA : centre décisionnel = Mégalopolis « BosWash ». Au Brésil,
centre décisionnel = le triangle SP-R. deJ. –BH. Des densités supérieures à 200
h/km² : les plus fortes densités restent donc celles des centres historiques.
Aux USA, on appelle ça le cœur économique et décisionnel. Il correspond
au 1/4 Nord-est : divisé en 2 espaces : 1° espace, le foyer des Grands lacs, 2°
espace, la Mégalopolis... Ces deux centres sont séparés par la chaîne des Appalaches.
La Mégalopolis abrite une ville mondiale,
NY, qui est un centre décisionnel
planétaire : Le 1/4 Nord-est abrite les foyers traditionnels de l'industrie
: acier, automobile, chimie, pharmaceutique... + un foyer agricole : élevages
bovins de Chicago, champs de soja et de maïs. 1/4
Nord-est = 40% du PIB
Au Brésil : « le cœur économique et décisionnel »
= le 1/4 Sud-est : Centre historique, encore plus polarisé : 70% du PIB du
Brésil ! 2 villes mondiales émergentes, Rio, capitale culturelle, et surtout
São Paulo, capitale industrielle. Le ¼ Sud-est est à la fois le cœur agricole
du Brésil (sucre, café) et son cœur industriel : industries classiques
(automobiles) et high-tech (industrie aéronautique Embraer).
C. Des périphéries dynamiques
Pour les USA : on retrouve un croissant périphérique dynamisé :
la Sun Belt, avec 4 foyers attractifs : dynamisés à chaque fois par la mondialisation :
-
Le Washington State, ou Pudgetopolis, lié à l'Asie et au Canada, industrie aéronautique,
Boeing, et informatique (Microsoft)
-
La
Californie, liée au Mexique et à l'Asie, grand centre mondial de l'informatique
(Silicon Valley) et du cinéma
agriculture (agrumes, fruits, productions maraichères)
-
le Texas, polarisé sur le Mexique et le
pétrole + la "Silicon Prairie"
(Entreprise Dell). Ces trois régions possèdent une interface frontalière
dynamisée par l’Alena
-
La
Floride, polarisée sur les Antilles, espace touristique et aérospatial,
agriculture tropicale et biotechnologie.
Au Brésil, périphérie dynamique moins
évidente : Le Sud agricole, avec l'Uruguay et l'Argentine (échanges
agricoles) + le Mato Grosso, plus au nord Dans ces régions, l’interface frontalière est en cours de valorisation. Le Mato
Grosso est devenu le géant du soja !
Porc, poulets bovins. Hydroélectricité (Barrage géant d’Itaipu). Dynamique
politique : le gouvernement a incité la population à migrer vers le centre dès
1960, avec le déménagement de la capitale à Brasilia, bâtie par l'architecte Niemeyer : La Capitale Brasilia,
ville champignon de banques et d'administration: peuplée de 100 000 habitants
en 1960, 2.5 millions aujourd'hui.
D. Les périphéries
délaissées :
Les
densités faiblissent au fur et à mesure qu’on s’éloigne de l’Océan.
Aux USA : les Prairies et l'Alaska souffrent d'un climat difficile : hivers
froids, été secs, tornades. Autre élément répulsif : les Rocheuses / Mais ces régions
sont en plein essor : tourisme (Montana)
Au Brésil, 2 centres répulsifs :
L'Amazonie et le Nordeste. Le Nordeste
est l'ancien centre historique. C'est une région devenue pauvre, et qui perd
des habitants. Remarquons toutefois le dynamisme textile de la ville de Fortaleza. L'Amazonie (54% du territoire) a longtemps été un lieu
pour les aventuriers (or), les voyous (trafic en tous genres) et les paysans sans terre qui pratiquaient l'agriculture
extensive.
Le
gouvernement parlait de fronts pionniers
: Bois, agriculture extensive, hydroélectricité. On s’interroge sur la
durabilité d’un système basé sur l’exploitation des ressources naturelles des
terres vierges : ce système n’est pas durable à moyen terme.
II. Des dynamiques en lien avec la
mondialisation qui recomposent le territoire
A. Des dynamiques
influencées par l'exploitation des richesses naturelles
Aux USA,
certains coins du 1/4 Nord-est sont sinistrés : On parle de « shrinking cities » : cas de Cleveland
et Pittsburgh (villes qui subissent la crise de l’acier) et de Detroit (ville
qui connaît la crise de l'industrie automobile). Comme ces villes ont fait
fortune sur l'industrie du fer, à la base de l'acier et de l'automobile, on
parle, par ironie, de la roasted belt.
Detroit : 1950: 1.8 millions d'habitants et 4° ville des USA. 2013 = 0.6
millions. Idem pour la ville de Flint, dans le Michigan. Le cinéaste Michael
Moore a dénoncé dans ses films les ravages de la mondialisation en se référant
à sa ville natale de Flint, et en prenant comme exemple l'État du Michigan,
sinistré, qui se dépeuple (film : The
big One, en 1997). Où va migrer la population qui quitte les Grands
Lacs ? Flux internes importants vers
la Sun belt. Phœnix, Las Vegas, les villes du Texas (Dallas, Houston, San
Antonio). Les Américains sont plus
mobiles que les Français. 12% des Américains bougent tous les ans (10% des
Français).
La volonté de développer les hydrocarbures non conventionnels (gaz de
schiste) aux USA favorise aussi le développement des Etats désertiques du
Dakota ou de l'Alaska. Nord Dakota =
plus forte croissance des USA. On assiste aux USA à un rééquilibrage de la
population, qui migre vers certains des États désertiques des prairies depuis quelques années
Les
Brésiliens ont fui au XX° siècle le Nordeste, la « périphérie en crise ». Le Nordeste est une région répulsive, aride, dont les
champs ont été ruinés par l'érosion. Une partie du Nordeste est formé de
buissons piquants adaptés au climat aride, et impropre à l'agriculture : il
s'agit de la caatinga, un territoire
ingrat et désertique, grand comme 2 fois la France, et qui se vide de ses
habitants. Toutefois, ces flux migratoires se sont ralentis depuis 10 ans.
Les
migrants partent souvent vers les fronts pionniers de l’Amazonie. Ces
fronts sont mieux structurés et de plus
en plus contrôlés par le gouvernement, qui surveille l'exploitation du bois, Le
gouvernement brésilien ne veut pas entendre parler de développement durable
mais il veut quand même aujourd'hui exploiter la forêt de façon rationnelle.
B. Une dynamique en
lien avec la mondialisation
La
mondialisation va renforcer les
migrations internes à destination des ports de commerce : rappel : 80% des
échanges mondiaux se font par la façade maritime. Aux USA, le port
de NY et les ports du golfe du Mexique se développent : Houston,
Sud-Louisiane (n°1), Beaumont. =Grands
ports pétroliers.
Au Brésil, les grands ports se nomment
Santos, qui est le port de la mégapole São Paulo, Itaguai, qui est le port
de la mégapole Rio, Paranagua, qui est
le port de la mégapole Curitiba = grands ports d'exportation des richesses
naturel (fer du Brésil, pétrole à Houston) et des produits manufacturés + port
d'importation (USA : 1° importateur
mondial). Les exploitations offshores accentuent la littoralisation.
Dans le cadre des organisations
régionales, les échanges sont très importants avec les pays voisins:
USA cadre
de l’ALENA : commerce dynamique avec Canada : une des frontières les plus
dynamiques du monde, twin cities
(Detroit-Windsor) et la « Seaway », le long du fleuve St Laurent,
permet aux villes des grands lacs d'être reliées à la mondialisation
(Cleveland, Chicago). A l'Ouest aussi, Pudgetopolis est reliée à la très
dynamique métropole de Vancouver, au Canada Pacifique. Idem avec les « twin citie »s de la Mexamerica : San Diego – Tijuana. Importance
des Maquiladoras. Mais frontière peu ouvertes pour les Mexicains, car crainte
de la drogue et de l'émigration.
Intégration
frontalière beaucoup moins forte au Brésil : obstacle de l'Amazonie.
Développement d'une zone commercial aux trois frontières : Brésil, Paraguay
Argentine, dans le cadre du Mercosur. + Projet d’infrastructures de transport
en partie financé par la Chine. : Route à travers l’Amazonie, jusqu’au
Pérou. Volonté de relier l’Océan Pacifique à l’Océan Atlantique.
C. Aux USA : une
dynamique liée à des flux d'immigrés :
Aux USA,
flux massifs de migrants, qui s'établissent surtout dans les États frontaliers
du Mexique. Modifient la composition ethnique de ces États. 1/3 des habitants
du Nouveau-Mexique parlent l'espagnol à la maison. Idem dans les autres États
frontaliers au Mexique. Cet afflux provoque la réaction xénophobe du
gouvernement Trump, qui veut inverser la tendance en décourageant l’immigration
par divers moyens.
Le Brésil a
connu un bouleversement. Jusqu'en 2005, pays d'émigration, surtout vers les
USA. Ensuite, le Brésil est devenu une terre d’immigration clandestine, avec un
flux de population, en provenance des pays les plus pauvres du continent :
Haïti, Bolivie, surtout vers le Sudeste. Ces populations étaient notamment
attirées par les chantiers de prestige des Jeux Olympiques et de la coupe du
monde de football. Mais depuis 5 ans, le Brésil traverse une grave crise. Chute
du PIB en 2016 (-3.6% !)
Nous avons
donc vu que le Brésil et les États-Unis et le Brésil partageaient de nombreux
points communs, autant dans
l'organisation de leur territoire que dans celle de leurs grandes mégapoles.
Ces deux pays connaissent actuellement des dynamiques territoriales
importantes, influencées par la mondialisation et par le dynamisme des
relations commerciales avec les pays voisins.
Il reste à
savoir si ces dynamiques migratoires sont passagères ou si elles sont
susceptibles de durer : la Californie et la Floride sont victimes de crises
climatiques régulières et semblent au bord de la saturation démographique,
tandis que l'aridité des sols des fronts pionniers amazoniens au Brésil ne laisse
pas présager une implantation massive et durable de la population. On a
l'impression parfois que ces vagues migratoires sont des "modes",
mais que sur le long terme, le cœur du pays, New York aux USA et São Paulo au
Brésil, restent constants, en vertu de l'ampleur de la force d'attraction qu'exercent les quelques
villes mondiales de notre planète.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire