Mondialisation,
finance internationale et interrogation européenne
Quels
sont les fondements du commerce international et de l’internationalisation de
la production ?
Le commerce international rassemble l’ensemble des échanges de
biens et services qui traversent une/des frontières. On distingue généralement
les importations des exportations. Le développement du commerce international
au cours du XXe-XXIe siècle conduit à une interdépendance croissante des
économies. On parle aujourd’hui de mondialisation.
I-
La libéralisation progressive des échanges
de biens et services au niveau mondial
A-
Qu’échangeons-nous ?
De 1950 à
2009, les exportations ont augmenté en moyenne de 6% par an. Durant cette même
période, les échanges internationaux de produits manufacturés ont été
multipliés par 60 soit une augmentation de 7% chaque année.
Le commerce
international a explosé au cours du XX siècle. A cela s’ajoute les
échanges de services (banques,
transports). Aujourd’hui, sur 100 produits échangés, 55 sont des biens
manufacturés, 25 des matières premières et 20 des services. La part des
services tend à s’accroitre d’années en années. Une part croissante
des productions nationales est aujourd’hui échangée avec l’étranger :
le commerce international progresse donc plus vite que la production mondiale. Les économies
sont de plus en plus interconnectées.
B-
Qui échange ?
Toutes les zones
géographiques ne sont pas intégrées à la mondialisation de manière inégalitaire.
Trois pôles essentiels ressortent : les trois pôles de la triade. D’autres
zones émergent. Enfin, les dernières sont mises à l’écart.
C-
Le GATT et l’OMC facilitent les échanges internationaux
Le GATT
(accords généraux sur les tarifs douaniers et le commerce) est signé en 1947.
Cet accord, conclu entre pays volontaires, vise à libéraliser progressivement
le commerce mondial, c’est-à-dire diminuer les droits de douane, supprimer les
quotas d’importation et plus largement toutes les entraves, barrières, aux échanges
internationaux.
Le GATT et l’OMC ont permis une diminution importante des droits de
douanes, ceux-ci sont en moyenne de 5% aujourd’hui alors que dans les années 1950, ils
étaient en moyenne à 40%. Dans le même temps, le nombre de pays membres a lui
aussi été multiplié par 8. Aujourd’hui, plus de 160 pays appartiennent à
l’OMC. La baisse des droits de douane est discutée lors de cycles de
négociation (round) c’est-à-dire des réunions où un accord multilatéral
est négocié sur certains biens et services. Ces accords contiennent entre autre
la
« clause de la nation la plus favorisée » ; un avantage donné
à un pays étranger doit être généralisé à tous les autres (sauf
exception).
En 1995, l’OMC a remplacé le
GATT :
-
Cette organisation a un champ d’action plus
vaste. Tous les biens et services peuvent faire l’objet de négociation.
-
L’OMC dispose d’un pouvoir de sanction à travers
l’ORD (organe des règlements des différents) : si un pays ne respecte pas
les accords, il peut y être contraint par l’OMC.
II-
Les déterminants du commerce international
Différentes
théories économiques cherchent à justifier le commerce international, celles-ci
ont rencontré un certain succès puisque l’immense majorité des pays
appartiennent à l’OMC aujourd’hui.
A-
Spécialisation et avantages comparatifs au cœur de la mondialisation
Selon la théorie des avantages d’A. Smith, les pays ont intérêt à échanger avec
les autres s’ils produisent de manière plus efficace que ceux-ci. Ainsi,
une partie
des pays sont exclus du commerce mondial s’ils ne sont jamais, pour
aucune production, meilleurs que les autres.
Ricardo va
remettre en cause cette théorie et présenter la théorie des avantages relatifs.
Pour Ricardo, chaque pays doit se spécialiser dans la production où il dégage
l’avantage le plus important ou le désavantage le moins important. En se
spécialisant, chaque pays fait augmenter la production mondiale. Le commerce international
favorise la croissance économique, chaque pays, en échangeant des biens et
services qu’il a abandonné sera plus riche. Le commerce international est donc
bénéfique à tous et pas simplement aux pays qui dégagent un avantage absolu.
è Ainsi, pour Ricardo, chaque pays doit se spécialiser dans la
production où il a le plus fort avantage, le plus faible désavantage. La
production mondiale augmentera, chaque pays sera plus riche en échangeant
plutôt qu’en vivant en autarcie.
B-
La théorie HOS prolonge la théorie des avantages comparatifs
La dotation
factorielle est la quantité de chaque facteur de production dont dispose un
pays. On distingue généralement trois facteurs de production : le travail, le
capital et la terre. Le pays doit se spécialiser dans les productions qui
nécessitent relativement le plus de ce facteur. Aujourd’hui, les
principales exportations de l’Australie sont des moutons et de différents
minerais. A l’inverse, l’Europe dispose relativement plus de capital, elle doit
se spécialiser dans les productions qui en ont besoin. Aujourd’hui l’Europe est
à la pointe dans les domaines aéronautiques.
La théorie HOS (Heckscher/Ohlin/Samuelson) complète celle de Ricardo en donnant
une origine à la plus grande efficacité dans la production de certains biens et
services. Ainsi, chaque pays doit se spécialiser où il est relativement
le meilleur (le moins nul) c’est-à-dire dans les productions qui nécessitent
relativement le plus du facteur le plus abondant.
La France
importe essentiellement de Chine des biens faibles en valeur ajoutée qui sont
produits à partir de capital de base et en travailleurs peu/pas qualifiés. Ce
sont de ces facteurs que la Chine est relativement le mieux dotée, il est
normal qu’elle se soit spécialisée dans ces productions. La France exporte essentiellement
vers la Chine des produits à forte valeur ajoutée qui nécessitent du capital de
pointe et une main d’œuvre qualifiée (aéronautique, machines produits
chimiques). Elle s’est donc spécialisée dans les productions qui nécessitent
des facteurs qui étaient relativement les plus abondants.
La théorie HOS
semble largement confirmée. Cependant, un pays ne se spécialise jamais totalement dans une
seule production. Il continue de produire d’autres biens et services
même s’il n’est pas le plus performant. Par ailleurs, cette théorie ne
distingue que trois facteurs de production. Dans la réalité, au moins 5 facteurs
peuvent être distingués : sol, capital de base, capital de pointe, travail
peu/pas qualifié et travail qualifié.
è La théorie des avantages comparatifs et la théorie HOS pousse
les pays du Nord à produire des biens et services à forte valeur ajoutée car
ils sont mieux dotés en capital de pointe et en travailleurs qualifiés. A
l’inverse, les pays du Sud se spécialisent dans les productions à faible valeur
ajoutée car elles nécessitent beaucoup des facteurs dont ils sont abondants (terre, travail peu qualifiée, capital de
base). On assiste à une DIT : division internationale du travail. Elle
tend à s’affaiblir depuis les années 1980.
C-
Le commerce intra-branche contredit en partie des théories classiques du
commerce international
Un échange
croisé est un commerce intra-branche, un commerce de productions similaires
entre pays. Ce commerce intra-branche est le plus développé
entre les pays du Nord où les populations sont riches et veulent pouvoir
choisir entre plusieurs marques. On parle de demande de différence. La concurrence
internationale permet aux consommateurs d’avoir accès à un large choix de biens
et services similaires.
L’indice de Grubel-Lloyd mesure la part des échanges intra-branche dans le
total des échanges. Ainsi, en 2006, 63% des échanges des USA
avec le reste du monde étaient des échanges intra-branche. Le commerce
intra-branche semble se développer depuis les années 1960/70 dans les pays du
Nord. Il remet en cause la théorie des avantages comparatifs et HOS puisque
plusieurs pays se spécialisent dans la production de biens et services
similaires. Les théories traditionnelles n’avaient pas anticipé ce
phénomène.
III-
Le libre échange est-il profitable à
tous ?
A-
Avantages et inconvénients de libre échange
1- Les
effets positifs de l’internationalisation des échanges
La
spécialisation amène chaque pays à être plus efficace sur la production du
bien/service dans lequel il s’est focalisé. Des gains de production vont
émerger. Par ailleurs, la DIT permet d’accéder à des ressources produites par les
autres, moins chères, ce qui va améliorer l’efficacité des pays importateurs.
Leurs gains de production seront plus importants. Ces gains de production
dégagées peuvent permettre d’être plus efficaces que la concurrence et permettent
d’accéder à des marchés plus vastes. Les entreprises devront développer
leurs productions ce qui sera favorable à la croissance. Au final, le libre-échange
stimule la production de chaque pays.
Plus largement, tous les
acteurs sont gagnants au libre-échange :
-
Les consommateurs : baisse des prix, hausse du
choix
-
Les producteurs : sont poussés à innover pour
se démarquer de la concurrence, ils se retrouveront en situation de monopole et
feront plus de profits. La production sera moins chère, développement de la
concurrence et baisse des prix des matières premières et des pièces détachées.
Le développement de leur capacité de production puisqu’un marché plus grand
s’offre à eux (économie d’échelle).
2- Les
perdants du libre-échange
La
colonisation a laissé aux pays du Sud des spécialisations sur les productions à
faible valeur ajoutée qui ne permettent que peu le développement et la
croissance. A l’inverse, les pays du Nord ont construit leurs spécialisations
sur des domaines porteurs (chimie,
micro-électronique) qui permettent le développement et la croissance
future.
Pour obtenir
les moyens de se développer, les anciens pays colonisés doivent vendre leurs productions
à un prix stable pour espérer avoir les moyens d’importer les technologies
nécessaires à leur développement. Mais les prix de leurs produits
tendent à décliner ce qui rend de plus en plus difficile leurs
importations.
Plus généralement, on calcule les
termes de l’échange d’un pays en comparant l’évolution du prix des biens et
services qu’il exporte à l’évolution des prix des biens et services qu’il
importe. Si le prix de ses exportations augmente plus vite que le prix
de ses importations, alors les termes de l’échange s’améliorent. Il devient dke
plus en plus facile d’importer grâce à ses exportations et inversement. Pour
les pays du Sud (sauf les pays pétroliers), les prix de leurs exportations
tendent à diminuer alors que le prix de leurs importations tend à augmenter.
Les termes de l’échange se dégradent, il devient de plus en plus difficile de
commercer avec les autres.
è Le commerce international ne semble pas profitable à tous à
l’inverse de ce que disaient les théories classiques (Ricardo). Deux facteurs
essentiels sont à prendre en compte :
-
La ou les productions
sans lesquelles se spécialise un pays
-
L’évolution des termes
de l’échange (importation et exportation)
B-
Avantages et inconvénients du protectionnisme
1- Comment
justifier le protectionnisme ?
Le protectionnisme est une doctrine qui vise à limiter les importations et à
favoriser l’économie nationale. On distingue deux types de barrières
protectionnistes :
-
Des barrières tarifaires qui visent à modifier le
prix des biens et services importés et/ou des productions exportées (droits de douane, subventions à
l’exportation)
-
Des barrières non tarifaires qui visent à modifier
toutes les autres variables que le prix (interdiction
d’importation, quotas d’importation, normes technologiques/environnementales/sanitaires).
Pour List, le
protectionnisme peut se justifier pour les jeunes entreprises qui n’ont pas
encore la capacité de faire face à la concurrence internationale. En les
protégeant, elles vont acquérir de l’expérience et pourront développer leur
production, dégager des gains de production qui leur permettront à terme de
vendre moins cher et faire face à la concurrence étrangère. On parle de protectionnisme éducatif ou des industries naissantes. Ce
protectionnisme ne doit pas être illimité mais temporaire, le temps pour
l’entreprise de faire face à la concurrence. Ce type de protectionnisme se
justifie plus pour les pays en développement, émergeants.
Dans les pays
du Nord, le protectionnisme pour les entreprises vieillissantes semble justifié,
il vise à protéger les industries qui menacent de disparaitre à cause de la
concurrence. Il faut laisser le temps à ces entreprises mourantes de soit se redéployer soit
les laisser
se fermer en douceur pour éviter une explosion du chômage dans ces
secteurs.
Enfin, certaines
entreprises sont jugées stratégiques du point de vue du développement du pays et
peuvent
être protégées (armée, énergie). On
parle de protectionnisme stratégique. En cas de
conflit ou d’évènement majeur, un pays se doit d’être autonome pour assurer son
développement et sa croissance.
2- Les
barrières se révèlent néfastes pour les consommateurs
Le
protectionnisme a cependant des limites qui touchent en premier lieu les
consommateurs (hausse des prix,
baisse du choix, moins d’innovation car les entreprises ne sont pas incitées à
s’améliorer, la concurrence étrangère n’existe pas). Plus largement, le
protectionnisme conduit à des risques de représailles de la part des pays
étrangers qui vont à leur tour interdire, limiter les exportations sur leur sol.
Les entreprises exportatrices produisent moins, la croissance sera ralentie.
IV-
L’impact des FTN sur le commerce
international
Une FTN est une
entreprise qui produit dans plusieurs pays et qui vend cette production à
l’internationale. Une FTN est constituée d’une société mère c’est-à-dire son
siège installé dans un pays (souvent dans son pays de naissance qui va
donner sa nationalité à l’entreprise). Les autres entreprises implantées à
l’étranger et appartenant à l’entreprise sont appelées filiales.
La société mère a traversé, transcendé ses frontières pour s’installer à
l’étranger. Le terme FTN laisse penser qu’une entreprise puisse avoir plusieurs
nationalités.
A-
Vers une nouvelle DIT ?
1- Commerce
intra-firme et DIPP
Le commerce intra-firme est l’ensemble des biens et services échangés au sein
d’une FTN. Puisque la production est implantée dans plusieurs pays, les
pièces détachées doivent traverser les frontières pour être assemblées dans un
autre pays afin de constituer le bien final. Ce commerce intra-firme ne
s’explique pas par les lois du marché puisque les prix pratiqués ne vont pas
correspondre au cout de production de chaque pièce détachée. Ainsi, il est
difficile de mesurer le commerce intra-firme, on l’évalue à 1/3 du commerce
international.
Ce commerce
intra-firme va faire naitre une nouvelle DIT : la DIPP. Les FTN vont
produire dans les pays qui leur permettent d’obtenir le plus d’avantages
possibles. Chaque pièce détachée sera produite dans le pays le plus
avantageux, généralement ces productions auront lieu dans un pays du Sud.
Ainsi, les
pièces détachées à faible valeur ajoutée et l’assemblage final auront lieu dans
les pays en développement. Les pays du Nord garderont les productions de services à
forte valeur ajoutée (R&D,
marketing). La DIT s’est complexifiée sous l’effet des FTN.
Pour développer une FTN, une
entreprise doit s’installer et produire à l’étranger. Elle peut le faire de
deux façons :
-
Construire de toutes pièces un nouveau site de production
-
Racheter un site de production étranger : IDE
(investissement direct à l’étranger) c’est lorsqu’une FTN, en investissant à
l’étranger, prend le contrôle de plus de 10% de la valeur d’une entreprise étrangère.
En
dessous de 10%, on parle d’investissement de portefeuille et on
considère que cet investissement est uniquement financier et non pas dans un
but productif.
2- Pourquoi
les entreprises s’ouvrent-elles au commerce international ?
La compétitivité mesure la capacité d’une entreprise à faire face à la concurrence
étrangère. On distingue deux types de compétitivité :
-
La compétitivité prix : l’entreprise cherche à
vendre à des prix inférieurs à ceux de ses concurrents (s’implanter dans un pays où la main d’œuvre est peu chère, s’implanter
dans un pays à faible taux d’imposition)
-
La compétitivité hors-prix : l’entreprise
cherche à vendre sur les autres variables que le prix, sur la qualité (développement technologique innovant, SAV
de qualité, production hors gamme, faibles normes)
è Les stratégies de localisation des FTN sont diverses. En
fonction du type de compétitivité recherchée, les FTN se développent plutôt au
Nord, au Sud ou dans les pays émergents.
B-
Impacts des FTN sur les pays d’accueil et de départ des IDE
Ø Pays
d’accueil :
-
Avantages : hausse de la production
(croissance), baisse du chômage, hausse du pouvoir d’achat, transfert
technologique (installation de capital
« de pointe » dans le pays).
-
Inconvénients : déstabilisation des
producteurs nationaux (concurrence avec
de très grandes entreprises), risque de dumping social et fiscal (droit du travail, impôts) qui
compromettent le développement du pays, politique du moins disant.
Ø Pays
de départ :
-
Avantages : baisse des prix. Si le pays de
départ est du Nord, il gardera des emplois qualifiés et délocalisera uniquement
les emplois à faible valeur ajoutée.
-
Inconvénients : les délocalisations amènent
à une hausse du chômage en particulier pour les travailleurs les moins
qualifiées, menace sur les protections sociales.
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