Mondialisation, finance internationale et intégration
européenne
Quelle est la place de l’Union Européenne dans l’économie
globale ?
I-
En quoi l’UE est-elle une expérience
originale ?
A-
Les objectifs de la construction européenne
La construction européenne est
née de trois volontés :
-
Mettre fin aux guerres sur le sol européen.
-
Faire face aux tensions nées de la chute du mur
de Berlin : tension entre le capitalisme et le communisme.
-
Avoir un poids suffisant pour peser dans l’économie
mondiale, pour influencer la mondialisation.
Le niveau
européen semble plus adapté pour mener des politiques à l’échelle
mondiale : le défi économique ne peut se résoudre au niveau national. Création d’un
marché des droits à polluer européen, un défi économique à plusieurs, l’Europe est
plus capable de résister à la concurrence étrangère et aux chocs financiers (crise
des subprimes). Un défi humain, face à la hausse des instabilités dans le monde, l’UE doit être
capable de protéger ses populations et mener une politique migratoire plus
efficace.
La
construction européenne reste aujourd’hui une nécessité, en particulier une
nécessité économique : faire jeu égal avec les Etats-Unis pour influencer
les prises de décision et être reconnus comme un acteur mondial majeur.
è L’UE a d’abord été construite pour des enjeux politiques
(mettre fin aux guerres) elle se transforme de plus en plus en union
économique. L’UE veut s’installer comme un acteur incontournable dans le monde.
B-
L’intégration économique régionale, pour quoi faire ?
1- Les
étapes de la construction européenne
Pour être
considérée comme une zone économique intégrée, le passage par différentes
étapes semble être nécessaire :
-
Création d’une zone de libre-échange entre les
pays membres : suppression des frontières internes à la zone
-
Création d’une union douanière, harmonisation
des frontières extérieures/économiques dans la zone
-
Création d’un marché commun : libre
circulation du capital et du travail au sein des pays de la zone
-
Création d’une union économique et monétaire
(UEM) : harmonisation des politiques économiques et création d’une monnaie
unique
-
Création d’une union politique : l’ensemble
des politiques en particulier économiques et extérieures, sont unifiées
Aujourd’hui,
les 28 membres ont tous atteint la 3ème étape, celle du marché
commun : capital, travail, marchandises et argent circulent librement au
sein de l’UE. Certains pays ont atteint la 4ème étape, celle de l’UEM
avec la création d’une monnaie commune, l’euro. L’union politique reste pour
l’instant limitée, les politiques sont harmonisées mais pas unifiées pour la
plupart des décisions.
Autres zones économiques : Alena,
Mercosur, Asean… les autres zones sont moins intégrées que l’UE puisqu’elles ne
sont que des unions douanières.
La création
d’un grand marché commun européen s’est déroulée de 1957 (traité de Rome) à
1987 (acte unique européen). En 1992 (traité de Maastricht), début des
discussions sur la création d’une union politique et monétaire. En 1999,
création réelle de l’UEM qui tend à s’élargir ces dernières années (19 pays ont
l’euro). Depuis 2007 (traité de Lisbonne), volonté d’avancer vers une union
politique (dernière étape de l’intégration avec par exemple une constitution
européenne et des institutions de plus en plus fortes).
2- Les
avantages attendus de l’UE
L’économie d’échelle est la baisse des couts de production unitaire avec
l’augmentation de la production. Plus une entreprise produit des grandes
quantités, plus elle pourra négocier les prix avec ses fournisseurs.
La création d’un vaste marché
commun a plusieurs avantages :
-
Permet de réaliser des économies d’échelle qui
poussent à la baisse des prix et donc à une meilleure compétitivité.
-
Le commerce est facilité par la suppression des
droits de douane, la libre circulation des capitaux permettra des
investissements plus efficaces et donc des rattrapages économiques plus
rapides.
L’UE a pour but de stimuler la
croissance, l’emploi… En théorie, l’UE profite :
-
Aux consommateurs (baisse des prix, hausse de la diversité)
-
Aux producteurs (hausse de la concurrence qui permet de trouver des fournisseurs moins
chers et donc stimuler le PT, les innovations pour rester compétitifs)
-
Les Etats nationaux (amélioration des finances publiques grâce à la hausse des recettes
puisque la croissance entraine plus d’impôts et taxes perçues et à la baisse
des dépenses puisqu’il est possible de se fournir à l’étranger)
3- L’euro,
une nouvelle étape dans la construction européenne
L’euro présente 3 avantages
principaux :
-
Il facilite les échanges en réduisant les
incertitudes liées aux différentes monnaies qui existaient avant, le prix
n’étant pas totalement transparent (il
était difficile pour les français de comprendre le Deutschemark et sa valeur).
Les échanges avaient tendance à être limités, avec l’euro, ces barrières ont
disparues, la croissance devrait être plus forte.
-
De plus les échanges sont facilités par la
disparition des frais de transaction lors du change d’une monnaie à une autre.
Avec l’euro, les entreprises voient leurs couts de production baisser (fin des
commissions dans les bureaux de change. Cela les incite à produire plus, la
croissance devrait être stimulée.
-
Le passage à l’euro met fin aux politiques
déloyales de dévaluation des pays. Avant l’euro, un pays pouvait faire perdre
de la valeur à sa monnaie (dévaluer) ce qui lui permettait d’exporter plus
facilement et de relancer la croissance et de faire baisser le chômage. Mais les
autres pays étaient perdants (plus difficile d’exporter pour eux mais plus
facile d’importer). Leurs croissances étaient ralenties. Pour éviter
d’éventuels problèmes de change, certains pays européens ont créé l’euro :
cette monnaie oblige les pays à se concentrer et à harmoniser leurs politiques.
II-
La difficile coordination des politiques
économiques dans l’UEM
On distingue deux grands types
de politiques économiques :
-
Des politiques conjoncturelles : qui visent
à modifier la situation économique à court terme (plus de croissance, moins de chômage…) pour y parvenir, on peut
avoir recourt à des politiques budgétaires. L’Etat modifie ses recettes
publiques (prélèvements obligatoires)
et/ou ses dépenses. Soit des politiques monétaires : l’Etat fait varier le
taux d’intérêt
-
Des politiques structurelles : c’est-à-dire
avec un impact à long terme (politique
industrielle, politique de santé, éducative…)
A-
Les politiques budgétaires dans la zone euro
1- Les
critères de Maastricht et pacte de stabilité
Pour intégrer
la zone euro, les pays doivent respecter des critères de convergence
économique, les critères de Maastricht :
-
Le déficit public ne doit pas excéder 3% du PIB. Les
dépenses de chaque Etat ne peuvent pas être supérieures à leurs recettes de plus
de 3% de leur PIB.
-
La dette publique ne peut
être supérieure à plus de 60% du PIB : l’accumulation des
déficits de toutes les années ne doit pas dépasser 60%.
Ne pas
respecter ces critères est perçu comme néfaste pour la croissance puisque
les pays s’entendent trop et devront on jour ou l’autre rembourser en
augmentant les impôts. De plus, ces déficits vont créer de l’inflation en augmentant
artificiellement la demande.
2- Le
dérapage des finances publiques menace la croissance
En 2015, le
déficit public français était de 3.5% du PIB. Ses dépenses excédaient ses
recettes d’un montant de 3.5% de son PIB. De même, la dette publique française
était de 95.8% du PIB. La France doit l’équivalent d’une année de création de
richesses à d’autres agents économiques.
De nombreux
pays de la zone euro ne respectent pas aujourd’hui l’un, l’autre ou les deux
critères de Maastricht. Ce dérapage des finances publiques s’explique en
partie par la crise de 2008. L’UE considère qu’aujourd’hui, tous les pays
doivent de nouveau respecter les critères, le non-respect n’ayant pas été
sanctionné après la crise.
Ce dérapage a deux
conséquences négatives :
-
Les pays ont de plus en plus de mal à financer
leur déficit. Ces derniers demandent des taux d’intérêt de plus en plus élevés
qui alourdissent à nouveau la dette (effet boule de neige). Au pire, certains
pays ne pourront pas emprunter (Grèce). Cela conduit à une baisse des dépenses
publiques (licenciements, baisse des
allocations, privatisation…) et/ou une hausse des recettes (impôts, taxes) pour ne pas avoir de
déficit.
-
L’explosion du déficit conduit les pays à
dépenser plus que leurs recettes. Ils augmentent donc artificiellement la
demande de biens et de services qui, si l’offre ne suit pas, conduit à
l’inflation et la perte de pouvoir d’achat.
Pour de
nouveau respecter les critères, les pays sont poussés à mener des politiques budgétaires de
rigueur/d’austérité (baisse
des dépenses publiques, hausse des recettes publiques). Le but est
d’obtenir un excédent public afin de réduire la dette et ralentir l’inflation.
Cependant, ces politiques réduisent la demande ce qui incite les entreprises à moins
produire ce qui va ralentir la croissance et donc faire monter le chômage.
è Pour certains, les critères de Maastricht sont trop
restrictifs, ne permettent pas de véritables politiques de relance pour sortir
de la crise. La volonté de respecter ces critères limite les capacités des pays
à sortir de la crise : la croissance reste atone.
B-
La politique monétaire
Les pays
membres de l’UEM ont décidé de mettre en commun leurs politiques monétaires.
Elle est aujourd’hui contrôlée par la BCE qui est une institution
autonome : les pays membres ne peuvent pas influencer la politique
monétaire. Elle est unique pour tous les pays. L’objectif de la BCE est d’atteindre
au niveau de la zone dans son ensemble un taux d’inflation proche de 2%.
Pour y parvenir, elle contrôle les taux d’intérêts directeurs qui servent au
financement des banques. La hausse du taux d’intérêt directeur rend l’argent plus
cher pour les banques commerciales qui augmentent à leur tour leurs taux
d’intérêt ce qui réduit les emprunts. La consommation et l’investissement
ralentissent, l’inflation est freinée.
Deux critiques sont faites à
la BCE :
-
Ne pas se fixer d’objectif de croissance :
le rôle de la BCE n’est pas de relancer/stimuler la croissance (à l’inverse de la Fed qui a un double objectif :
croissance et inflation)
-
Si les pays sont dans des situations divergentes
(faible/forte inflation), que doit
faire la BCE ? Sa politique étant unique, en favorisant un pays, elle
défavorise l’autre et inversement.
C-
Les limites de la gouvernance européenne
1- Les
élargissements sont remis en cause
L’UE est
aujourd’hui constituée de 28 pays dont les 13 derniers sont rentrés durant les
15 dernières années. Les situations de ces pays sont de plus en plus
hétérogènes et rendent les politiques européennes de plus en plus difficiles à
mener. D’autant plus que le budget de chaque pays consacré à l’UE reste limité.
Le rattrapage de ces nouveaux entrants est de plus en plus compliqué.
Par ailleurs,
décider à 28 est de plus en plus compliqué. Les négociations prennent du
temps et l’UE
réagit parfois trop tardivement. Si les décisions se prennent à
l’unanimité, un petit pays peut tout bloquer.
2- Une
harmonisation économique limitée
Les couts du
travail sont très hétérogènes au sein de l’UE. Les pays fondateurs ont
des couts au moins 2 à 3 fois supérieurs à ceux des nouveaux membres. Les
écarts peuvent venir soit par des écarts de salaire soit par des écarts de
cotisation. Ces écarts conduisent à une concurrence déloyale : les
entreprises ont intérêt à s’installer dans les pays de l’Est où la main d’œuvre
est moins chère et à vendre leurs produits à l’Ouest sans payer des droits de
douane puisque les frontières n’existent pas en Europe. Pour attirer le plus
d’entreprises possibles, les pays sont poussés à pratiquer du dumping
social : proposer des couts et des protections toujours plus faibles que
ses voisins.
Les gagnants
sont les pays les moins développés de l’UE (derniers entrés). Les perdants
sont les pays les plus développés de l’UE (pays fondateurs).
En France, en
2009, les dépenses publiques représentaient l’équivalent de 56.5% du PIB. La France
consacre en moyenne 9067€/hab pour leur protection sociale. L’équivalent de
11.6% du PIB était consacré aux dépenses de santé et 5.6% pour les dépenses
d’éducation.
Les systèmes de
protection sociale en EU sont très hétérogènes. Par exemple, la France
et l’Allemagne consacrent 10 fois plus d’argent par habitant que la Roumanie.
L’harmonisation de nos systèmes est difficile à obtenir :
-
Les pays de l’Est n’ont pas les moyens d’aligner
leurs protections sur celles de l’Ouest. De plus ils ne le souhaitent pas car
leur compétitivité prix en souffrirait
-
A l’inverse, les pays de l’Ouest ne veulent pas
détruire leurs systèmes de protection sociale : les populations y sont
opposées.
è L’harmonisation semble difficile voire impossible. Soit les
pays de l’Est s’opposent à une harmonisation par le haut. Soit les pays de
l’Ouest s’opposent à une harmonisation par le bas. Pour l’heure, il n’existe
donc pas de système de protection sociale européen.
è La construction européenne est une expérience originale
d’harmonisation des politiques économiques et sociales. Si elle a bien
fonctionné de sa création jusqu’aux années 2000, elle apparaît plus en
difficulté pour poursuivre cette harmonisation depuis.
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