lundi 5 juin 2017

SES, Thème 5 : Intégration, conflit et changement social, La conflictualité sociale : pathologie, facteur de cohésion ou moteur du changement ?, TES

Thème 5 : Intégration, conflit et changement social
La conflictualité sociale : pathologie, facteur de cohésion ou moteur du changement ?
I-                    La conflictualité sociale : de quoi parle-t-on ?
A-     Définir les conflits sociaux
Une action collective ou un mouvement/conflit social se caractérise par quatre critères :
-          Des individus agissent collectivement de manière volontaire (souvent à travers des syndicats, associations, collectifs…)
-          Ils réclament un changement qu’ils jugent bénéfique pour la société, défendent des idéaux, valeurs importantes à leurs yeux (avortement, mal bouffe, augmentation de salaire)
-          Ils s’opposent à un adversaire connu de tous (des entreprises, les APU)
-          Se mobilisent de manière diverse (manifestation, boycott, pétition)
Au final, les conflits sociaux sont une opposition entre au moins deux groupes aux intérêts antagonistes qui se mobilisent à travers un répertoire d’action diversifié (manifestation pour ou contre le mariage pour tous, séquestration de patrons Air France, grève générale en Guyane, opération escargot, phénomènes NIMBY…).
B-     Des conflits en évolution
Les sociologues distinguent deux types de conflits sociaux :
-          Les conflits du travail qui ont lieu dans le monde économique, en entreprise
-          Les nouveaux mouvements sociaux (NMS) qui traversent l’ensemble de la société

1-      Les conflits du travail disparaissent-ils ?
En 1976, 4.1 millions de journées n’avaient pas été travaillées, cela signifie qu’il y a eu 4.1 millions de jours de grève cette année-là. En 2008, 7.6% des salariés étaient syndiqués.
Le nombre de jour de grève a chuté depuis les années 1970. Aujourd’hui, on compte moins d’un demi-million de jours de grève par an contre au moins 8 fois plus dans les années 70. Les conflits du travail ont donc tendance à disparaitre dans notre société. Les travailleurs entrent de moins en moins souvent en opposition avec le patronat.
Il existe plusieurs explications à ce déclin :
-          Le niveau de vie des salariés s’est considérablement amélioré ces 50 dernières années. Ils réclament moins souvent des hausses de salaire. Plus largement, les enjeux matérialistes sont de moins en moins un motif de conflit. Les enjeux matérialistes regroupent toutes les réclamations qui portent sur la quantité de biens et de services dont un individu peut disposer.
-          Les taux de syndicalisation très faibles limitent l’action des syndicats. Ceux-ci ne semblent pas représentatifs du monde du travail. Leurs appels à la grève sont moins nombreux et moins suivis.
-          La tertiarisation de la société conduit à une baisse du poids des ouvriers or ce sont généralement les premiers à se mobiliser.
-          La négociation salariale en amont semble se développer dans les entreprises. Le dialogue social semble se pacifier et permet d’éviter les conflits.
-          Le développement de la précarité limite l’engagement des titulaires de contrats courts qui ne se sentent pas membres d’un collectif et ne voient pas l’intérêt de lutter pour des améliorations qui ne les touchent pas.
-          Il ne semble pas rationnel de manifester : c’est le paradoxe d’Olson. A quoi bon perdre une journée de salaire en faisan grève alors que les entreprises accordent une hausse de salaire à tous qu’ils aient manifesté ou non. Il est donc plus rationnel de jouer au passager clandestin (profiter des avantages obtenus sans en payer le cout). Si chacun tient ce raisonnement, les conflits ne devraient pas avoir lieu or l’individualisme semble s’être développé dans nos sociétés.

Cependant les conflits du travail n’ont pas disparu. Ils se sont transformés :
-          Pour limiter l’impact négatif sur les salariés les conflits sont souvent moins longs et prennent la forme de freinage (ralentissement de la production) ou de débraillage (interruption courte atelier par atelier)
-          Les conflits deviennent plus violents (destruction de matériel, séquestration)
-          Les conflits du travail sont plus souvent défensifs qu’offensifs. Les salariés réclament moins souvent des hausses de salaire mais une meilleur protection de leurs droits en interpellant si nécessaire l’Etat (limitation des licenciements, plans de reclassement importants). Les salariés cherchent à garder ce qui existe déjà et se battent moins pour de nouveaux droits.
-          Les conflits ont tendance à se déplacer du secteur privé au secteur public (fonctionnaires peuvent plus facilement se mobiliser car ne risquent pas de représailles directes de leur patron)
-          Pour aboutir, les conflits visent à paralyser la France (SNCF, barrages routiers, transporteurs aériens)

è Les conflits du travail ont évolué sur 3 critères :
-          Les acteurs s’engageant dans le conflit (baisse du secteur privé, hausse du secteur privé)
-          Les enjeux du conflit (offensif/défensif)
-          Le répertoire d’action mobilisé (baisse des grèves/hausse des conflits courts et violents)

2-      La diversité des nouveaux mouvements sociaux (NMS)

Conflits du travail
NMS
Acteurs
Actifs : essentiellement des ouvriers, peu diplômés, hommes, plus de 40 ans
Citoyens : catégories moyennes/favorisées, diplômés, hommes et femmes, jeunes
Représentants, encadrants
Syndicats, partis
Associations, collectifs temporaires
Enjeux
Travail (enjeux matérialistes) : hausse des salaires, protection des travailleurs
Post-matérialistes : revendication qualitative, lutte pour une meilleure qualité de vie, valeurs importantes
Répertoire
Grèves, actions violentes
Actions à visée médiatique : manifestation, Gay pride, boycott, intrusion dans une centrale nucléaire

Dans les années 70/80, les conflits sociaux se transformaient pour laisser place aux NMS. Ils ne sont pas construits sur une opposition de classe et dépassent les enjeux matérialistes. Ils mettent en évidence une nouvelle culture politique basée sur le travail et sur l’épanouissement personnel, sur les valeurs qui touchent les individus.
Egalité (manifestations pour le mariage homosexuel, droits des femmes, accueil des migrants) Liberté (presse, Amnesty international, opinion) Ecologie (destruction de fast food, champs OGM, Green Peace) Solidarité (altermondialisme).
Le développement de ces NMS a été permis par la montée de l’individualisme après les Trente glorieuses qui ont permis la satisfaction des besoins matériels et ont laissé plus de place à l’épanouissement personnel.
II-                  Comment analyser les conflits sociaux ?
A-     Le conflit : pathologie de l’intégration ou facteur de cohésion ?
1-      Le conflit comme rupture du lien social
Les conflits sociaux peuvent être perçus comme un manque d’intégration de certains groupes.
L’affaiblissement des institutions et des solidarités peuvent conduire les individus à adopter des comportements anormaux. N’étant pas encadrés par la famille, la religion, l’Etat, l’individu peut entrer en conflit avec le reste de la société en voulant imposer des normes et des valeurs. Si l’individu c’était senti appartenir à un groupe, ses revendications auraient été moins fortes et les conflits moins nombreux.
Plus largement, les valeurs et les normes d’une société doivent encadrer les comportements de l’individu. Ces normes ont tendance à se relâcher avec la montée de l’individualisme. L’affirmation des valeurs personnelles va donc se développer, les conflits aussi. Si les normes et les valeurs avaient été mieux partagées/inculquées, les conflits auraient été réduits.
è Au final, les conflits naissent d’une trop grande frustration qui trouve sa source lorsque l’écart entre les buts à atteindre et les moyens donnés aux individus pour les atteindre est trop grand. On parle d’anomie.

2-      Le conflit comme créateur de lien social
Dans d’autres analyses, le conflit peut être envisagé comme un facteur de la cohésion sociale :
-          Entrer en conflit nécessite de s’organiser, de débattre et créer donc du lien social au sein du groupe qui souhaite manifester (fabrication des tracts, organisation de manifestations)
-          Certains conflits visent à affirmer les valeurs essentielles d’une société. Les individus mettent en avant leurs points communs avec les autres. De la solidarité mécanique apparait. Le conflit rapproche les individus, forme des liens
-          Les conflits sont créateurs de liens sociaux car ils finissent généralement par l’adoption d’un compromis. Chacun fait valoir son opinion mais l’Etat finira par trancher. Cette décision devrait rapprocher les individus, mettre fin aux tensions
-          Les conflits peuvent aussi créer des liens au sein de chaque groupe. Une solidarité entre les manifestants se développe puisqu’ils partagent une expérience qui les rapproche.

è Au final, selon les analyses, les conflits peuvent être perçus comme un manque d’intégration, pathologie intérieure, soit, au contraire, comme des évènements créant du lien social.

B-     Le conflit : moteur ou frein au changement social
Le changement social est l’ensemble des transformations des normes, valeurs, culture, mentalité qui affecte durable le fonctionnement d’une société.
1-      Le conflit comme facteur de changement social
Les événements de mai 1968 remettent en cause le modèle autoritaire sur lequel était basée notre société. Dans chaque domaine, les institutions sont fragilisées, les individus ne veulent pas se voir imposer leur comportement (remise en cause des forces de l’ordre, des patrons, professeurs).
Mai 1968 s’explique par différentes transformations économiques et sociales :
-          Le baby-boom qui augmente le nombre de jeunes avec des valeurs et une culture différente de celle des ainés
-          Un essoufflement du modèle fordiste. L’ouvrier ne veut pas être considéré comme un robot, un enfant
De nombreux changements  sociaux se sont développés avec les évènements de mai 1968 (montée de l’individualisme, remise en cause des institutions, demande de plus de liberté/égalité, transformation de la vision du travail, préoccupation internationales…)
D’autres conflits ont été moteurs du changement : manifestation pour le mariage homosexuel (montée de la tolérance), les mobilisations répétées de Green Peace, WWF ont sensibilisé les individus aux problématiques écologiques. Les mouvements altermondialistes ont développé une solidarité internationale et favorisé un commerce plus juste.
2-      Le conflit comme résistance au changement social
A l’inverse, le conflit peut être le signe d’une résistance au changement, peut exprimer la volonté de maintenir les valeurs existantes (manifestation contre la nouvelle région, contre le mariage pour tous, contre la réforme des retraites) et montre une volonté de garder le système existant. La remise en cause du système est néfaste aux yeux des manifestants. Ils luttent pour ralentir ces changements.
è 2 grilles d’analyse peuvent être développées sur les conflits :
-          La première montre qu’ils peuvent perçus comme facteurs ou rupture de lien social

-          La deuxième les présente soit comme des moteurs ou des freins au changement social 

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