L’Asie du Sud et de l’Est : les défis de
la population et de la croissance
Le planisphère sur les foyers de peuplement nous
rappelle qu’un terrien sur deux vit sur la zone que nous étudierons. Le manque
de place dans cet espace saute aux yeux
de tous. D’autant que les richesses naturelles y sont rares (3% du pétrole). Nous
n'étudions pas toute l’Asie, mais les 3
foyers de peuplement vus en seconde : Asie sud (Inde et Pakistan),
Asie Est (Japon et Chine) et Asie du sud-est (Indonésie, Philippines) = Un peu
plus de la moitié de la superficie de l’Asie, qui concentre la totalité de la
population de l’Asie moins celles du Moyen-Orient, de l’Afghanistan et de la
Sibérie russe.
Quels
sont les défis posés par la gestion de
l’importante population et de la croissance économique forte en Asie ?
Après
avoir analysé les défis démographiques que l’Asie doit affronter, nous
aborderons ceux posés par la croissance économique. Le défi du développement
durable sera abordé en 3° partie.
I.
Les défis démographiques de l’Asie
A. 55% de la
population mondiale
L’Asie du
Sud et l’Asie de l’Est constituent les principaux foyers de peuplement de la
planète : 4 milliards
d’individus = 55% de la population
mondiale, sur à peine 20% des terres émergées
-
Foyer d’Asie du Sud = encore plus peuplé que Asie de
l’Est : 1.8 milliard d'habitants. Le géant de cet espace est l'Inde avec 1.25 milliards d'habitants. Pakistan,
Bangladesh, Népal sont peu connus mais très peuplés aussi.
-
1.6 milliards d’habitants pour l'Asie de l’Est.
Le géant de cet espace est la Chine, avec 1.35 milliards d'habitants. Japon
très peuplé aussi, et forte densités à Taïwan ou en Corée.
-
alors que le 3° foyer, "Asie du Sud-est" est un peu moins peuplé : 0.6 milliards d’hab ce foyer
abrite un géant : l’Indonésie : 250 millions d'habitants, mais les Philippines
et le Viêt-Nam sont aussi très peuplés.
-
Au niveau étatique, on remarque que 6 des 10
pays les plus peuplés du monde sont situés là-bas : Chine, Inde, Indonésie (4°
pays du monde pour la population, derrière les USA), Pakistan, 6° pays du
monde, avec 180 millions d'habitants, Bangladesh, n°8 et Japon n°10.
B. des densités de population très fortes
Evidemment,
les densités sont fortes, souvent supérieures à 200 h/km². On dépasse même
fréquemment les 300 habitants au km² (325 h/km² au Japon), ce qui nous fait
parler de surpopulation. Les records mondiaux sont situés dans des petits pays
: 500 h/km² en Corée du Sud ! Plus de 1200 h/km² au Bangladesh. Et ceci, sans
compter le fait que ces espaces sont souvent montagneux. Exemple de la Chine :
de vastes espaces sont totalement vides d'hommes, à cause des montagnes et des
déserts, et la quasi-totalité de la population s'agglutine dans le tiers
oriental du pays, où les densités sont souvent supérieures à 600 h/km². Il en
va de même au Japon, où la population s'agglutine le long de la mégalopole
Tokyo/Kita (100 des 127 millions
d'habitants du pays). Le reste du Japon, montagneux, est vide.
« Mégapole »
= une grosse ville très peuplée, avec une « métropole », une ville qui abrite des fonctions de
commandements. Ne confondez pas non plus avec une « mégalopole », une succession de grandes villes proches les
unes des autres.
Les densités
sont fortes, d'autant que les populations asiatiques se concentrent souvent dans
des grandes villes, qui sont énormes. Exemple : Manille, capitale des Philippines : Ce pays connait une croissance
démographique encore soutenue (3 enfants par femme). De plus, il connait un exode rural important. La croissance démographique
se fait donc au profit des deux îles les plus urbanisées, et surtout au
bénéfice de Manille, l'énorme capitale méconnue de 24 millions d'habitants, qui
poursuit sa progression ininterrompue.
C. Une croissance démographique en voie de stabilisatio
Des pays qui connaissent une croissance démographique "à
l'Européenne", dans lesquels la population n'augmente pratiquement
plus. Asie de l'Est : d'ici à2050 : diminution de la population au Japon (-15%),
en Corée du Sud, et très légère baisse en Chine =
Vieillissement rapide des sociétés des pays d’Asie de l’Est. En Chine, le PCC a
décidé d'en finir avec la politique de l’enfant unique, afin de relancer une
natalité en berne (1.5 enfant par femme). Le Japon, lui, avec 1.3 enfants par ♀, est déjà confronté à la « société argentée ».
On remarque donc qu'en Asie de l’Est, les indices de
fécondité sont encore inférieurs à ceux de la peu pourtant peu féconde Europe
(Taïwan : 1.1 enfants par ♀ = record du monde ! Ils sont très loin du 2 enfants
par femme français).
Asie du Sud-est et Asie du Sud = faible croissance démographique
jusqu’en 2050. IF légèrement supérieur à 2 : atterrissage en douceur vers
le régime démographique moderne Indice de Fécondité = 2.25 enfants/♀ en Indonésie, à peine supérieur au seuil de renouvellement des générations, qui est de 2.1 enfant par femme idem Viêt-Nam, Thaïlande, Inde = 2.5
enfants par femme. Croissance modérée de la population d'ici à 2050 : Hausse de
25% de la population en Indonésie d’ici à 2050, hausse de + 30% en Inde. Ce
n'est pas si énorme en valeur relative, mais, en valeur absolue, la population de l'Inde augmente quand même de
15 millions d'habitants par an ! (Contre 6 millions d'habitants en plus par an
en Chine). En clair, l’Inde va dépasser la Chine dans un futur proche (2023 ?).
Ce ralentissement de la croissance est un soulagement
: le Bangladesh est déjà surpeuplé, avec
plus de 1000 h/km², et le pays n'a plus de place pour accueillir une population
supplémentaire. Bangladesh : Indice de fécondité de 2.4. La population
n'augmente que de 2.5 millions d'habitants pas an, mais où mettre tout cela ?
Les populations les plus pauvres s’accumulent
dans les slums insalubres (zones inondables de Dacca, la capitale du
Bangladesh).
Un groupe de 4 pays qui connaissent encore une croissance démographique
soutenue : 2 petits PMA enclavés, Népal et Laos, et deux pays
déjà très peuplés, qui ralentissent lentement : Pakistan et Philippines.
Là-bas, l’indice de fécondité est encore supérieur à 3 enfants par femme.
Une situation démographique largement stabilisée, surtout si on la compare
à celle de l’Afrique, mais le manque de place rend crucial l’arrêt de la
croissance démographique. Dans ce contexte, la situation de l’Asie du Sud inquiète plus que celle de
l’Asie de l’Est ou du Sud-Est.
II.
Les défis de la croissance
économique
A.
Un constat : des poids économiques et des niveaux de vie très
divers
Le poids
démographique peut être un atout pour la croissance économique de l’Asie :
main d’œuvre importante, jeune et souvent bien formée, grâce à des universités
de plus en plus renommées.
-
Le PIB,
c'est-à-dire le poids économique de chaque Etat : sans surprise, le plus
gros carré = la Chine (2° puissance économique mondiale), devant le Japon (n°3)
et l’Inde (n°10) et la Corée (n°15). Le Japon a été le premier pays à se
développer dans la zone, dès le XIX° siècle. Il a entrainé par imitation les
autres pays de la région qui ont tenté d’imiter ce modèle économique. Les
Asiatiques parlent de « vol d’oie sauvage ».
-
IDH : Cet
IDH est élevé dans certains pays qui ont un niveau de vie digne du monde
occidental : il s’agit du Japon, de
Singapour et de Hong Kong, et, à un degré moindre, de Taïwan et de la Corée
du Sud. = les « pays riches » ou "pays du Nord". La Chine,
Malaisie et Thaïlande : entre 0.7
et 0.8 = situation intermédiaire. Des pays relativement pauvres, mais en
voie d’enrichissement. Les autres pays sont clairement des pays pauvres. Au Bangladesh,
une importante partie de la population urbaine s’agglutine dans les slums. En
Corée du Nord, les chiffres ne sont pas fiables et les économistes supposent que
le pays vit dans une grande misère, une misère masquée par la propagande
stalinienne de l’affreux Kim-Jung-Un.
Dans cet espace, à la fois des pays
très riches (Japon, Taïwan, en couleur rouge), et aussi des PMA, comme le
Cambodge ou le Népal… Extrême diversité économique des pays de la région. Mais
il faut relativiser. En fait, l’Asie abrite peu de pays dont la population est
réellement riche. Ainsi, la Chine vogue de succès en succès depuis 40 ans, mais
elle part de très bas, et surtout, sa population est si nombreuse qu’il est
difficile de répartir équitablement cette richesse qui profite avant tout à une
minorité. Concrètement, une bonne partie des Chinois vivote avec des salaires
faibles, compris entre 200 et 500 euros par mois. Il en va de même pour les
Indiens, les Indonésiens ou les Thaïlandais.
B.
Le défi des pays riches : maintenir un taux de croissance
correct
Japon
et Corée du Sud, durement frappés par la
crise, et dont les chiffres de
croissance sont nécessairement plus bas car ces pays ont dès le départ un PIB
élevé. Ces deux pays sont en outre concurrencés par tous les pays à bas salaire
de la région, ce qui est un handicap important dans des États où les salaires sont,
en moyenne, élevés. Rappelons, en outre,
que le Japon est devenu moins compétitif avec la hausse du yen, que le jeune
Tsubasa appelait l’ « endaka » et orthographiait 円高不況.
C.
Le défi des pays en développement : réussir à conjuguer la
croissance et le développement
+10 % par an.
La plus médiatisée des croissances a été celle de la Chine : miracle
économique, croissance impressionnante de 1980 à 2012. Mais attention, depuis
2013, la croissance s’est essoufflée ! A peine + 6.8% d’après les chiffres
officiels de 2015, qui en plus sont inexacts. On est sans doute proches d'une
croissance de +2%. Progressivement, la Chine découvre les problèmes du Japon et
de la Corée : comment maintenir un bon taux de croissance quand ses
voisins ont des coûts de production plus bas ? Moins médiatisés : l'Inde,
le Vietnam et l'Indonésie ont également connu une croissance de ouf au cours de
la période.
Idem, à un
degré moindre, pour la Malaisie ou la Thaïlande (5 à 10%, ce n'est pas si mal).
Bref, quasiment toute l’Asie du sud et
de l'Est est concernée ! Ces pays
appartiennent à un espace qu’on appelle « l’ASEAN ». Dans cette zone,
une classe moyenne commence à accéder à la société de consommation
Certains
pays accompagnent leur croissance d’un réel développement qui profite à la
population : Exemple du Bangladesh : ce pays, accablé par toutes les
misères pendant tout le XX° siècle, est
passé de 60 à seulement 30% de la population vivant sous le seuil de pauvreté.
A l’inverse, même dans les pays les plus riches, la croissance ne profite pas à tous : à
Hong Kong, la ville qui est pourtant la
plus riche de Chine, les plus pauvres vivent dans des taudis infâmes, des conditions
de vie humiliantes. Le contraste est en effet saisissant en Chine entre
l’augmentation continue des revenus des + grosses fortunes , qui donne
naissance à une classe sociale avide de produits de luxe (sacs Vuitton,
Ferrari) et les salaires restés très bas pour la majorité des autres emplois, souvent précaires (rappel : Foxconn :
salaires de 200 à 300 €/mois) = un indice de Gini très fort, qui peut créer des
tensions sociales.
En Inde,
au Pakistan, c’est pareil ! Ces pays ont des « esclaves pour dettes », exploités
par de patrons millionnaires, alors que l’Inde abrite aussi une classe de
cadres sup avec un excellent train de vie. Fortes inégalités sociales dans les
différents quartiers de la mégapole de Mumbai : encerclés par les slums ; les
CBD de Mumbai (« Quartier du fort » et « Bandra-Kurla »)
figurent parmi les quartiers les plus
riches du monde.
III.
Les défis du développement durable en Asie
A. Le défi de l’essoufflement
de la croissance économique
Une 1° fragilité de la région : l'Asie de l'Est
dépend du reste du monde pour sa croissance, qui lui importe des produits
manufacturés. La croissance a été forte en Asie parce que les salaires étaient
très bas et compétitifs. Mais c'est moins vrai en 2017, les salaires en Chine
ont beaucoup augmenté et il est devenu plus intéressant pour un Européen d'investir
en Bulgarie ou au Maroc qu’en Chine ou en Corée. Les gouvernements de ces pays
asiatiques redoutent que les Occidentaux
cessent d’investir chez eux, ce qui risquerait d'entraîner des tensions sociales graves.
Beaucoup
de pays essaient alors de créer une croissance autonome, axée sur le marché
intérieur, et de moins dépendre de l’extérieur. Les Chinois doivent s’habituer
à fabriquer des jouets pour leurs propres enfants, et non plus uniquement pour
le marché occidental.
B. Le défi du manque de terres
C’est
l’autre conséquence de l’enrichissement de la région : des populations
plus riches mangent plus et exploitent donc davantage de terres agricoles. En
même temps, des populations plus riches vont revendiquer des logements plus spacieux,
qui vont provoquer naturellement l’agrandissement des villes, au détriment des
terres agricoles. Il se trouve que les mégapoles les plus peuplées du monde
sont déjà situées en Asie. Elles sont souvent beaucoup plus compactes que les
mégapoles étasuniennes. Résultats : une forte densité humaine dans ces
villes : des logements serrés, des moyens de transports saturés, des
infrastructures de loisirs également saturées, comme le prouvaient les images
de la piscine de Tokyo.
Le
phénomène du manque de place est aggravé sur les côtes par la littoralisation
(90% des échanges internationaux se font par la mer). Les populations se
déplacent vers les zones littorales de l’Asie, qui sont alors envahies de
nouveaux habitants, alors que l’intérieur des terres se vide. Ainsi, l’ouest de
la Chine est désertique, alors que la côte est surpeuplée. Partout en Asie, le
phénomène de littoralisation est flagrant. On peut rappeler l’exemple de
Mumbai, qui attaque la mangrove des alentours pour s’agrandir.
Comment
trouver de nouveaux espaces en bord de mer ? Le japon a adopté des
solutions coûteuses en construisant sur la mer : des terre-pleins
(rappel : aéroport d’Osaka). Et comment faire face au manque de terres
arables : les meilleures terres partent en effet dans la spéculation
foncière : les pays à fortes densités (Japon, Corée, Bangladesh, Viêt-Nam)
grignotent leurs terres arables et leurs forêts. C'est notamment vrai à cause
des mégapoles qui s'agrandissent aux dépens des terres agricoles, comme le
montre la photo d'Hanoi, au Viêt-Nam. Et que peut-on penser de l'Indonésie, qui
sacrifie l'immense île forestière de Bornéo pour développer des champs de
palmiers à huile.
Au final,
beaucoup de pays asiatiques sont obligés
d’importer leur nourriture. Résultats : Chinois, Indiens, Sud-Coréens achètent des terres agricoles partout dans le
monde, et notamment en Afrique de l'Est. Cette situation est une forme
d’impérialisme, qui profite peut aux pays africains qui louent leur terre. Ce n’est en aucun cas
une solution durable.
C. Le défi du manque de
ressources naturelles
Manque de ressources naturelles : la Chine
est largement pourvue en pétrole et en
charbon, mais elle est obligée de mettre son territoire sous tension pour
fournir de l’énergie à toute son immense population
exemple : barrage des Trois Gorges, immense, qui a altéré l’environnement local. Idem pour le
charbon largement utilisé en Asie et qui
rejette du Co² (Idem au Japon, en Corée Indonésie, Taïwan).
La plupart des États d’Asie (Inde,
Japon, Viêt-Nam, Bangladesh) sont dépendants de l’extérieur pour leur
ravitaillement en source d’énergie. Cette dépendance serait encore plus forte
en cas de brusque envolée du coût des matières premières (à la suite d’une
guerre, par exemple), qui accroitrait encore la dépendance de la région envers
le reste du monde. Cette dépendance explique l’amabilité extrême des Chinois pour des
régimes peu recommandables, comme le Soudan ou l’Iran : ces pays sont des
pourvoyeurs de terres agricoles. En outre, l’utilisation du charbon entraine
une pollution extrême : tableau liste des villes les plus polluées du
monde : presque toutes en Asie : New Delhi dégage 20 x plus de CO²
que Paris.
Prise de
conscience du problème, dans toute l’Asie de la nécessité de ne pas dépendre
uniquement des sources d’énergie fossiles, pour des raisons stratégiques (ils
n’ont pas de pétrole) et pour des raisons humaines (ces pays suffoquent déjà
devant l’ampleur de la pollution). Certains pays développent l’économie verte. Le
Japon est en pointe dans la lutte contre la pollution, et la Chine s’y est mis
aussi depuis 15 ans, développant des
véhicules électriques, des panneaux photovoltaïques et des éoliennes….
Une zone du monde peuplée et prospère,
mais qui souffre d'importantes inégalités, et qui a bâti une croissance
destructrice de l'environnement. Ces pays sont confrontés à un perpétuel défi
posé par leur enrichissement dans des zones surpeuplées, ce qui crée des
tensions sur les terres et les ressources naturelles. La Chine est emblématique
de l’ambiguïté des politiques asiatiques à l'égard du développement durable : d'un
côté, elle promeut une croissance économique propre et fait de la protection de
l'environnement une priorité nationale. De l'autre, elle abandonne la politique
de l'enfant unique et souhaite relancer sa natalité, ce qui ne manquera pas, à
moyen terme, de faire augmenter la
pression sur l'espace foncier chinois.
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