Mobilité,
flux et réseaux de la mondialisation
La première mondialisation est celle des Grandes
Découvertes aux XVe et XVIe siècles, la deuxième
correspond à la révolution industrielle au XIXe siècle. Nous en
sommes déjà à la troisième mondialisation. À chacune d’entre elles, l’espace
s’est davantage livré, ouvert, unifié. On assiste à une mise en relation des
différentes parties du monde permettant à ce dernier de fonctionner comme un
système, la mondialisation est réalisée par des flux. La mondialisation
consiste en un processus de mise en relation des différentes
parties du monde par l'intensification des flux (Elle engendre une intégration
différenciée des territoires dans un monde de plus en plus interdépendant).
Les flux, les mobilités, les réseaux sont donc à la base de la
mondialisation. Ils font la mondialisation. Étudier leur fonctionnement, c’est
donc étudier le fonctionnement de la mondialisation. Quel rôle jouent ces
mobilités, ces flux, ces réseaux dans le fonctionnement de la mondialisation ? Les
mobilités ont explosé, quels qu’en soient le type ou l’échelle. Les flux de
toute nature s’effectuent désormais au niveau mondial à une vitesse et une
fréquence jamais atteintes. Des réseaux à hautes performances rendent possibles
ces migrations et ces échanges.
I-
Les mobilités
A- Economiques et politiques
La
mobilité des hommes a triplé depuis les années 1980, que ce soit pour les
migrations de réfugiés, pour les mobilités touristiques ou pour les mobilités
professionnelles.
Le
processus de la mondialisation se caractérise
par des flux migratoires de plus en plus importants. Les pays
occidentaux attirent les immigrés venus du monde entier, à cause de leur bon
niveau de vie, notamment. Ainsi, le continent européen a subi l'arrivée de 1.2
million d'immigrés clandestins venus d'Afrique et du Moyen-Orient en 2015, ce
qui représente 31.5% de l'ensemble des arrivées mondiales de migrants. Cet attrait est liée au bon niveau de vie des
Européens et aux prestations sociales généreuses offertes à ses résidents,
quelles qu'en soient l'origine. De plus, l'Europe est un foyer riche et facile d'accès à côté de zones répulsives qui subissent de
vives tensions: l'Afrique et le Moyen-Orient. D'autre part, le flux de migrants
vers les USA concerne 19.7% des migrations mondiales. Il se fait
essentiellement par la voie terrestre, à travers l'immense frontière (3100 km)
entre les États-Unis et le Mexique.
Mais les flux migratoires ne
concernent pas seulement des habitants de pays pauvres fuyant vers des pays
riches. Ces personnes qui s'exilent pour améliorer leurs conditions de vie sont
appelées des migrants économiques. A leurs côté,
on trouve aussi les migrants politiques : ce
sont des personnes qui émigrent avant tout pour sauver leur vie qui est menacée dans leur pays d'origine du
fait de la guerre ou d'une situation politique tendue. Cette catégorie de
migrants émigre souvent vers le pays voisin, qui est souvent pauvre lui aussi,
parce que lorsqu'on veut sauver sa vie, on n'a pas toujours le temps
d'échafauder des projets subtils permettant de s'exiler vers des pays au cadre
de vie agréable. Ainsi, des milliers de Congolais ont fui la guerre vers les
pays voisins très pauvres du Burundi ou de l'Ouganda. La plupart des réfugiés
syriens ont émigré vers des pays voisins
à la Syrie : Liban, Turquie ou Jordanie,
parfois même Irak.
L’ampleur du phénomène
migratoire provoque l’élection de chefs d’État qui promettent de stopper ce
mouvement :
-
Election de Trump aux USA, qui promet de
fortifier la frontière avec le Mexique
-
Mur de Viktor Orban en Hongrie, pour protéger
son pays de l’afflux d’immigrés venus
des Balkans.
B- Touristiques
A côté de ces mobilité migratoires, qui sont
définitives, et qui se réalisent souvent dans des conditions dramatiques, on trouve les migrations touristiques, qui sont beaucoup plus
légères, et qui surtout sont éphémères, puisque le séjour à l'étranger se limite
souvent à quelques jours.
Dans
ce type de flux, on assiste au phénomène inverse : ce sont souvent des
populations issues de pays riches qui se rendent vers des pays moins riches. On
peut donner l'exemple d’Européens qui partent en vacances en Égypte ou d’Etasuniens
allant en villégiature au Mexique. Mais ce mouvement est, au final, minoritaire
: les mobilités touristiques se sont plus généralement d'un pays riche vers un
autre pays riche : Etats-Unis, Italie,
Espagne, France ou Autriche sont des destinations très touristiques. La plupart
des vacanciers se rendent en effet en priorité dans des pays dits
"sûrs", depuis que la vague terroriste islamiste a détourné les
touristes des pays musulmans comme la Tunisie ou la Turquie.
Enfin,
avec l'enrichissement des populations des pays émergents, on constate l'essor
touristes venus des BRICS : Russes, Brésiliens, Indiens ou Chinois sont de plus
en plus nombreux à visiter des pays étrangers. Il s'agit de plus souvent de
touristes à fort pouvoir d'achat.
C- Professionnelles
Il nous faut aussi parler des mobilités professionnelles. Les mobilités
professionnelles concernent notamment les élites qualifiées : des ingénieurs
qui s'expatrient pour un contrat, des travailleurs frontaliers, qui font la
navette auprès d'une entreprise du pays voisin (Alsaciens en Allemagne,
Lorrains au Luxembourg).
Les pays du Sud sont, en outre, touchés par la "fuite
des cerveaux" ou "brain drain" : c'est le départ des
meilleurs élèves des meilleurs facs de
certains pays (Inde, Europe de l'Est), courtisés par des universités
prestigieuses qui veulent recruter les meilleurs élèves du monde. Ce phénomène
se traduit par un départ d'une élite qui serait pourtant très utile pour
permettre le développement des pays émergents. Ainsi, la plupart des médecins
kenyans n'exercent pas au Kenya, mais dans des pays à haut niveau de vie comme
l'Australie, les USA ou la Grande-Bretagne.
II-
Les flux
Les flux sont de natures variés : ils
concernent des produits finis, des matières premières et des capitaux.
A- Les flux marchands
Ce sont
les pays du Nord, à fort pouvoir d’achat, qui consomment le plus et c’est donc vers eux que les
flux marchands se dirigeront en priorité. Mais, avec l’émergence de
certains pays du Sud, les flux commerciaux se répartissent de façon plus
équilibrée qu'autrefois : ainsi, la
Chine est devenu le 1° pays acheteur de voitures.
Les flux
de matières premières et d’hydrocarbures sont un sous-élément des flux marchands.
Ils se font encore majoritairement des pays du sud, où se trouvent les
principaux gisements (pétrole du Venezuela ou du Moyen-Orient) vers les pays du
Nord, gros consommateurs (USA = 25% de la consommation de pétrole pour à peine
5% de la population mondiale).
B- Les flux financiers
Mais les
flux qui brassent le plus de devises sont les flux financiers.
Depuis les années 1990, ils ont pris des proportions gigantesques : leur
montant représente 50 fois le montant du volume des flux commerciaux. Les flux
financiers peuvent être de deux
natures :
-
Les flux de capitaux,
qui se concentrent avant tout dans les pays riches, et surtout aux
Etats-Unis : qui abritent le NYSE et le NASDAQ : commerce d’actions,
d’obligations, de SICAV, d’or ou de devises se font à une échelle mondiale
depuis qu’internet relie les différents marchés financiers entre eux.
-
Les flux d’IDE
permettent aux grandes FTN d’étendre leur influence à l’échelle mondiale. Ces
flux peuvent être motivés par la
recherche de bas coûts de production (Renault qui s’installe au Maroc) ou
par la recherche d’une clientèle nouvelle (le suédois IKEA ouvrant un
magasin en France).
Mais
qu'ils soient marchands ou financiers, les flux touchent en priorité les pays
les plus développés de la planète.
C- Les flux traversent le monde et les
pôles
Les principaux pôles commerciaux sont l'Europe
et l'Asie-Pacifique. L’Europe est le principal pôle mondial d’émission et de
réception de flux. Sa particularité est d’échanger avant tout au sein même de
sa propre zone (67% des échanges) : des exportations automobiles allemandes
vers la France ou des exportations agricoles françaises vers la Belgique, ceci
en vertu du libre-échange propre au traité de l’UE.
Le pôle asiatique est devenu
presque aussi important que le pôle européen. Et le montant des flux échangé y
augmente à un rythme plus élevé que partout ailleurs. En Asie, les flux
commerciaux se dirigent pour moitié à l'intérieur de la zone asiatique (Des
jouets chinois exportés en Corée ou au Japon) et pour moitié à l'extérieur de
la zone asiatique (Des jeux vidéo japonais exportés vers l'Europe).
L'Amérique du Nord est le 3°
pôle. Mais le volume de ses échanges y est trois fois moins important qu'en
Europe (2097 milliards de dollars d'exportations de marchandises contre 6320
milliards de dollars en Europe en 2014)
Le Moyen-Orient compte
uniquement grâce à l'exportation des hydrocarbures, exportés à 90% à
l'extérieur de la zone moyen-orientale.
Les pôles sud-américains et
africains sont en retrait, mais ils progressent rapidement et leurs flux se
font en priorité avec l'Asie, l'Europe et l'Amérique du Nord.
III-
Les réseaux
La
mondialisation aboutit à un monde qui se connecte en de multiples réseaux : les
réseaux sont l'ensemble des relations complexes qui existent entre les
différents acteurs de la mondialisation.
A-
Des réseaux matériels
Réseaux
matériels : les flux de marchandises ont fortement augmenté. Les individus
et les marchandises se dispersent
dans le monde entier, grâce à des
infrastructures qui facilitent leurs déplacements.
Sur terre, les autoroutes se sont développées
dans le monde entier. Longtemps décrié, le réseau autoroutier d'Europe de l’Est,
par exemple, s'est développé dans le
cadre des grands investissements de l'UE, sur la base des fonds du FEDER. De
vastes routes transcontinentales sont en construction, reliant l'Europe à la
Chine, l'Afrique du Nord à l'Afrique subsaharienne, la côte Est à la côte ouest
de l'Amérique du Sud, à travers le Brésil.
Les réseaux aériens se sont
également améliorés, aidés en cela par la multiplication des hubs, qui
fluidifient et rationnalisent le transport aérien, tout en faisant diminuer les
coûts. Les hubs de Roissy, Heathrow ou Chicago sont parmi les plus importants.
Enfin, les réseaux portuaires se sont modernisés et agrandis, permettant au
commerce international de prospérer, notamment dans les grands hubs portuaires
d'Asie orientale (Ningbo, Shanghai ou Singapour).
B- Des réseaux immatériels
Les réseaux immatériels sont aussi en pleine croissance :
c'est le cas des systèmes de localisation par satellites : GPS, téléphonie, internet
est le réseau par excellence utilisé pour les flux de capitaux.
Outre les flux de capitaux,
internet favorise aussi les réseaux
sociaux. Facebook, par exemple,
permet à des millions d’individus solitaires
de découvrir qu’ils ont des centaines
d’amis. Les réseaux immatériels organisent en effet nos loisirs : les
chaînes de télé venues du monde entier diffusent une variété de loisirs et
d’information : la RAI italienne, CNN et Al-jazzera du Qatar propose une
offre variée. Quant à Youtube, il agit comme un réseau qui se substitue
progressivement à la télé. Les gesticulations farfelues du sud-coréen « Psy » ont fait le buzz dans le
monde entier depuis 2012 et le clip a été visionné plusieurs milliards de fois
grâce à ce réseau gratuit. Nous pouvons aussi donner l'exemple du réseau
Twitter.
C- Des réseaux humains
Enfin,
évoquons les réseaux humains : développons deux réseaux humains notoires :
-Les réseaux mafieux : de
nombreux lieux de contacts existent
entre les lieux de production (Maroc et Colombie pour la drogue) et les
lieux de consommation : Europe et Amérique du Nord, notamment. Autour de la
Méditerranée, des mafias organisent le
passage des clandestins vers les pays du Nord : réseaux albanais
organisant le passage de la Turquie vers l’Europe, avec des points de passage
ciblés : Lampedusa, littoral espagnol…
-Les réseaux ethniques ou diasporas concernent les groupes ethniques qui se regroupent
en-dehors de leur territoire d'origine : la plus célèbre de ces diasporas est celle des Chinois, disséminés dans les
grandes métropoles des pays riches et surtout dans les pays d'Asie du Sud-est
(Indonésie, Thaïlande). On peut aussi
évoquer la diaspora maghrébine en
Europe de l'Ouest ou le réseau
d'immigrés indiens en Europe et en Amérique du Nord. Parfois la diaspora concerne des retraités
qui s'exilent au soleil : comme ce
récent réseau de Français qui migrent au Portugal pour y passer une retraite moins coûteuse qu'en France.
Les flux de marchandises, de capitaux, d’informations et les mobilités de
personnes, profitant de réseaux ultra-modernes, mettent ainsi en relation
presque tous les lieux de la planète. Les flux de la mondialisation intègrent
des parties sans cesse croissantes de l’espace terrestre. Jamais comme
aujourd’hui l’expression « village global » (MacLuhan) n’a pris tout son sens.
Réseaux et flux ont provoqué un changement dans la perception de l’espace,
lequel est davantage un espace-temps. Cette accessibilité renforcée des
différents lieux du monde ne signifie pas pour autant une uniformisation de
celui-ci : chacun reste soi, mais désormais plus connecté à l’autre que jamais
dans l’histoire.
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